Un ours et un lapin philosophent dans la nature. Sous influence Jankélévitch, Nylso signe un album pour enfants passionnant sur la recherche de soi et de l’autre.
Son amour pour la nature et son goût pour la méditation sur le sens de la vie transparaissaient déjà dans la remarquable série Jérôme, histoire d’un jeune apprenti libraire se rêvant écrivain-voyageur. Nylso publie aujourd’hui Gros Ours et Petit Lapin, déambulation philosophique dissimulée sous l’apparence inoffensive d’un album pour enfants – spécialité des excellentes éditions Misma, qui publient notamment les délires infantilo-trash de Simon Hanselmann.
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Petit Ours et Gros Lapin sont deux amis que tout oppose, qui ne cessent de se défier et qui pourtant ne peuvent se passer l’un de l’autre. L’ours, prédateur du lapin, est un animal contemplatif, pessimiste, lucide, ironique, qui recherche la tranquillité. Le lapin est sentencieux, roublard, très autoritaire. Tout au long de l’album, ils paressent dans l’herbe, dorment, discutent ou se baladent en silence – des errances prétextes à de superbes pages muettes.
Une nature généreuse
Leur compagnonnage improbable et fragile les amène à s’interroger sur la survie, sur la précarité de leur existence, sur la compatibilité entre compétition et amitié, et enfin sur le devoir moral. Ce beau récit sur la recherche de soi et de l’autre, placé sous le signe du philosophe Vladimir Jankélévitch, témoigne de l’humanité de Nylso et de sa poésie douce-amère.
Encore plus que dans Jérôme, l’environnement est au cœur de ses préoccupations. De son dessin minutieux et minuscule, Nyslo représente une nature généreuse, dans laquelle les animaux se confondent, fusionnent, se fondent – il faut parfois les chercher pendant quelques secondes avant de les découvrir au pied d’un tronc d’arbre, au bout d’un chemin herbu.
Refuges hors du monde
Cette nature, dont les animaux profitent, qu’ils respectent et ont à cœur de protéger (l’inquiétude de l’ours pour les abeilles), est également au centre d’un recueil de dessins de Nyslo qui paraît simultanément. Dans Cabanes, cette nature toujours dense semble reprendre ses droits sur les habitations.
Cachées dans les hautes herbes, nichées dans les arbres, planquées derrière des ruines ou un rocher, à la fois partie intégrante du paysage et hors du monde, ces petites bicoques, représentées dans le même style finement hachuré, semblent autant de refuges pour se couper du monde et mieux réfléchir sur soi-même.
Gros Ours et Petit Lapin (Misma), 224 pages, 20 €
Cabanes (Michel Lagarde), 114 pages, 23 €
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