Le trio, devenu duo, fait de cette traversée difficile un tremplin pour se réinventer.
Il y a deux ans, le trio Aufgang implosait. Son pianiste-star, Francesco Tristano, annonçait son départ pour des “divergences” qu’on supposait musicales. Pour un groupe d’instrumentistes venus du classique et convertis à la transe de la techno, des anciens élèves de la Juilliard School habitués à décloisonner les genres et à se dégager l’horizon, l’argument ressemblait à de la diplomatie prestement emballée. Et pourtant…
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Le bien nommé Turbulences fait plus qu’ouvrir un nouveau chapitre dans l’histoire d’Aufgang. Il initie de manière radicale une séduisante histoire parallèle, improbable en théorie mais plus que crédible
à l’écoute de cet audacieux album qui fait (presque) table rase du passé. Un de ses possibles résumés : “Si un disciple de Nusrat Fateh Ali Khan prenait le pouvoir au sein de Phoenix, aidé par un jazzman et un producteur de techno fan de Vitalic ou de Mr Oizo ?” Ou l’inverse : “Des amateurs d’electro-pop détournent un orchestre world music à des fins mélodiques.” Tant de pistes sont ici explorées, tant de textures et de sonorités sont malaxées et transformées qu’aucune description ne pourra s’imposer.
Une mutation inattendue et accrocheuse
Réduits au format du binôme, Rami Khalifé et Aymeric Westrich se sont multipliés. S’ils ont, entre autres, reçu le renfort du cousin de Rami, Sari, pour les plantureux arrangements de cordes, ils se démènent, l’un assurant piano et claviers, l’autre la batterie et la programmation rythmique. Plus inattendu, les deux donnent de la voix (parfois en lui conférant une tessiture inhumaine). Ils ont en effet décidé de mettre leur virtuosité transversale et leur ouverture musicale au service de chansons.
Tubes potentiels de l’hiver naissant, Mizmar et son rageur riff oriental, le bondissant Shaman ou le lumineux Summer (avec Clara Luciani en guest) reflètent la démarche d’un duo tourné vers le partage. Il ne cède pas
pour autant au nivellement vers le bas et ne sacrifie aucune partie de sa culture métissée et étendue. On croit parfois avoir affaire à des mirages sonores (Paysage, proche dans l’esprit du classique Strings of Life de Derrick May), mais l’écoute répétée de Turbulences valide une mutation inattendue et accrocheuse.
concert le 10 mars à Palaiseau
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