Derrière le succès de MHD se cache Dany Synthé, compositeur des plus gros tubes rap de l’année 2015. Rencontre dans son studio de Montreuil, où trône sa Victoire de la musique de la chanson de l’année pour Maître Gims.
En remontant cette petite rue pavillonnaire de Montreuil, difficile d’imaginer que s’est jouée ici la récente Victoire de la musique de Maître Gims. C’est pourtant là, derrière la porte de la chaufferie, au sous-sol de l’immeuble, qu’a été produit Sapés comme jamais, chanson de l’année composée par Dany Synthé, maître des lieux. Mais quand on sonne, ce n’est pas lui qui ouvre. Emmanuel Barichasse, guitariste du groupe de rock Stuck In The Sound, se fend d’un sourire : “Dany ? Ah… Il n’est pas toujours à l’heure mais entre, on partage les studios avec lui.” Un café plus tard, Dany déboule, forcément désolé. Le lascar n’a pas toujours fréquenté le rock parisien, occupé un studio à Montreuil ni planqué ses notes derrière les stars du rap. Mais la consécration trône sur l’étagère :
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“Ça ? C’est ma Victoire de la musique… Ça a tout changé, même Obispo n’en a jamais eu, sourit-il, affalé dans un fauteuil devant la console de mixage. Depuis, je suis submergé, on me demande partout.”
Il y a un an, Dany bossait encore dans sa chambre d’ado, comme il le fait depuis qu’il a 10 ans, bercé de folk, de rap américain et de musique africaine :
“A l’école, j’étais à fond dans les maths mais la musique m’intéressait plus que tout. J’ai décidé d’assurer mes arrières avec les études mais mon but était de faire du son.”
Dans son quartier des Hautes-Noues, à Villiers-sur-Marne, il écoute tout et comprend vite, pianotant sur un clavier Yamaha jusqu’à ce que son voisin Nessbeal choisisse une de ses musiques : “J’avais 16 ans et une star du rap aimait ma musique !” Parallèlement, il découvre l’ordinateur, Cubase et ses centaines de plug-in. Mais le vieux Yamaha n’a pas disparu ; on ne s’appelle pas Dany Synthé pour rien :
“Chez les Congolais, on aime être plus français que les Français, on met souvent le nom de l’instrument dans le blaze. Daniel, synthétiseur… Dany Synthé !”
Ma solitude, de Nessbeal, force la connexion, avec Skread et Orelsan, qui l’embarquent en tournée. Disiz le repère et il rempile, avant que Gims n’en fasse le directeur musical de sa tournée. “Là, ça devient sérieux : je suis compositeur, musicien de scène et je monte un label.” Un mélange de surprise et de fierté se lit sur son visage. S’il travaille cet après-midi sur un morceau de Black M (Sexion D’Assaut), c’est autre chose qui l’occupe : l’album de MHD, qu’il a en partie composé et réalisé, sort dans quelques jours. Du jeune prodige de l’afro-trap, dont les chansons cartonnent dans les boomers de 7 à 77 ans, il ne dit pas grand-chose, préférant se planquer derrière son clavier :
“L’afro-trap, c’est MHD, c’est son truc à lui. Par contre, c’était intéressant d’en faire quelque chose qui aille au-delà de la musique de danse, de fête. C’était le challenge.”
Réputé pour son mélange de flow américain et de musique africaine, MHD a trouvé en Dany le contrepoint essentiel. Calme et inventif, le producteur glisse sous les invectives une épilepsie mesurée, parvient même à inventer une trap piano-voix au ton introspectif tout en parsemant le reste de gimmicks synthétiques tringlés de beats en 3D. En cela, Danny Synthé figure l’archétype du producteur de rap moderne.
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