« La jeune fille sans mains », présenté à l’ACID, est un film d’animation minimaliste brossé en trois en coups de pinceaux, entre l’estampe et le spectacle de lanterne magique.
Adapté d’un conte éponyme peu connu des frères Grimm, où il est question d’un meunier, de sa fille vertueuse et d’un diable tentateur (qui offre d’incommensurables richesses en échange de cette dernière, mais ne parvient jamais à la faire vraiment sienne), La jeune fille sans mains entre certes dans la catégorie du film d’animation, quoiqu’en un sens fort large. Si le label existait, on parlerait plus volontiers dans le cas présent de film de superposition, de peinture, d’esquisse. Le dessin ici est conservé dans la belle sauvagerie de son geste : visages en trois coups de pinceau, formes ébauchées…
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Un film-estampe
Sébastien Laudenbach use d’un remarquable minimalisme, d’une extrême économie. La perception du film devient un jeu mental consistant à combiner une gerbe de couleur et un mince bruitage, pour ressentir toute la richesse d’une action. Il bouleverse aussi les règles de l’immobile et du mouvant. A rebours de la dialectique traditionnelle du fond fixe et de l’élément animé, La jeune fille sans mains opère plutôt par strates de peinture. L’expression du mouvement part du glissement d’une couche, de l’estompement d’une autre, usant d’un langage d’une inventivité sans cesse renouvelée et qui semblerait presque parfois pouvoir se jouer en live…comme un spectacle de lanterne magique qui ferait se déplacer des estampes sur le faisceau du projecteur.
Le geste est, à vrai dire, si minimal que la matière même du dessin ne renvoie parfois même plus à l’objet qu’elle représente. Quand la hache attaque un tronc, c’est la peinture qui tremble plutôt que l’arbre ; quand une rivière se déverse dans un vallon, c’est le bleu qui inonde l’écran et ne vaut plus que pour lui-même. On pense souvent au Conte de la princesse Kaguya : art de conserver l’irrégularité infiniment vivante du croquis, description apaisée de la nudité et de la sexualité (si précieux dans un cinéma jeune public), personnage féminin exploré dans son intimité et ses affects, mais qui tire aussi vers le divin et la fée…
Rien qu’Isao Takahata ne viendrait renier.
La jeune fille sans mains (France). De Sébastien Laudenbach avec Anaïs Demoustier, Jérémie Elkaïm. Présenté à Cannes à l’ACID (l’Association du Cinéma Indépendant pour sa Diffusion)
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