Entretien avec Bobby et Peter Farrelly, les grands frères, réalisateurs des « Femmes de ses rêves », leur deuxième film avec Ben Stiller après « Mary à tout prix ».
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« N’importe quoi ! «
Entretien > Comment avez-vous connu Ben Stiller et toute cette bande que l’on appelle le Frat Pack ?
Bobby – On ne connaît pas la plupart de ces types, même si nous sommes amis avec Ben Stiller et les frères Wilson.
Peter – On ne se sent pas vraiment liés à ce groupe. A l’époque où nous avons rencontré Ben lors du casting de Mary à tout prix, il était relativement inconnu. Et Jim Carrey en était à peu près au même point quand nous avons fait Dumb & Dumber avec lui. Nous avons collaboré à nouveau avec l’un et l’autre par la suite mais nous aimons surtout travailler avec de jeunes acteurs montants, plutôt méconnus. Parce que ce sont ceux-là qui vous surprennent. Malin Akerman, par exemple, a apporté une foule d’idées très drôles à ce film.
Comment compareriez-vous vos deux expériences avec Ben Stiller ?
Bobby – Elles furent très différentes, mais toutes les deux excellentes. Ben a évolué, et pour le meilleur. Lorsqu’il s’était présenté au casting de Mary…, décrocher le rôle n’avait pour lui rien d’évident, c’était une chance. Par ailleurs, il travaillait en même temps au montage de Disjoncté. Son apport à notre film était alors encore très verrouillé. Aujourd’hui, il est producteur et autrement plus libre et impliqué dans la création de films auxquels il participe. Il a été infiniment plus actif dans la préparation et la fabrication de ce dernier film qu’au temps de Mary… Et c’est pour nous une chose bienvenue. Il est intelligent, il sait ce qu’il fait, et il est très rigoureux, ce qui n’est pas notre cas.
Etes-vous si détendus sur vos tournages ?
Bobby – Disons que nous sommes distraits (rires) Dans Fous d’Irene par exemple, Jim Carrey subissait un implant à la mâchoire, et devait arborer un bandage dans les scènes consécutives…
Peter – Mais comme nous ne tournons pas nos films en continuité, nous avons oublié le bandage dans certaines séquences où il aurait dû le porter, et nous l’avons filmé avec quand nous n’aurions pas dû… C’était n’importe quoi ! (rires)
Bobby – Notre approche est assez légère. On nous dit que faire des comédies est un travail difficile, mais nous n’y croyons pas. En tout cas cela ne devrait jamais l’être ! Nous sommes très décomplexés, à l’aise, sur le tournage. On essaie d’y voir un plaisir plus qu’un travail. C’est notre style.
Néanmoins, vos réalisations sont très précises, vous ne laissez pas vos films se faire n’importe comment…
Peter – Nous essayons énormément de choses quand nous tournons, et c’est pourquoi nous nous efforçons de travailler sans contraintes. Il s’agit de tenter ci et ça plutôt que de se corseter dans l’idée que les choses doivent être ainsi et pas autrement. C’est seulement au montage que nous entendons être dans l’exactitude et faire le tri entre ce qui marche et ce qui ne marche pas.
Bobby – Il y a un bénéfice certain à ne pas obtenir tout ce à quoi l’on s’attend. Si l’on fait juste ce que l’on veut absolument faire, on ne tire pas plus du film que ce que notre imagination nous autorise. Il faut parfois passer à côté de ce que l’on cherche pour que des possibilités plus intéressantes s’ouvrent. C’est ce qui nous est arrivé sur Dumb & Dumber. Jim Carrey était peut-être la centième personne que nous avions vue pour le rôle. Et on en avait supplié des gens !
De tous les acteurs avec lesquels vous avez travaillé, qui s’est révélé le plus créatif ?
Bobby – Sans hésitation, Bill Murray. C’est quelqu’un qui se pointe sur le plateau, jette juste un œil à son texte et puis le met de côté, avec un air qui dit : “C’est bon, j’ai saisi l’essentiel.” Et là, il réinvente tout. Et c’est bien meilleur que ce qui était écrit. C’est le genre de choses qui vous terrorisent quand vous avez passé un an sur un script et qu’un acteur le balaie ainsi d’un revers de main. Mais Bill améliorait absolument tout. En cela, personne ne lui arrive à la cheville, pas même Jim Carrey ou Ben Stiller.
Percevez-vous l’influence de votre œuvre sur la comédie contemporaine, et notamment sur le travail de Judd Apatow, réalisateur de 40 ans, toujours puceau et En cloque, mode d’emploi ?
Bobby – C’est une comparaison qui nous plaît, parce que nous aimons beaucoup Apatow, même si nous voyons une différence nette entre son travail et le nôtre : une grande part de son humour tient à la répartie, au verbal, tandis que notre comique est plus physique. Il y a évidemment des similarités, mais il a clairement son propre style. Ses films, que je trouve excellents, ont une réelle singularité.
Peter – Par ailleurs, il a autour de lui une foule d’acteurs, scénaristes et autres qui n’appartiennent qu’à lui. Ça me plaît. Il n’a pas recours à des corps prêts à l’emploi, il trouve les siens et il les façonne. Vous allez beaucoup entendre parler de lui au cours des dix prochaines années.
Propos recueillis par Julien Gester et Olivier Joyard
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