Pour sa 19e édition, le festival des Eurockéennes de Belfort qui se tenait du 29 juin au 1er juillet dernier a encore une fois frappé fort entre grosses pointures internationales, découvertes multiples aux atmosphères variées et formations en devenir. Et, qui l’aurait cru, la pluie s’est même montrée timide.
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Sur les coups de 18h, c’est le gipsy punk des Américains de Gogol Bordello qui a ouvert sérieusement les hostilités sur la grande scène après le rock plutôt convaincant des Français Kaolin. La joyeuse troupe américano-ukrainienne aux allures de fanfare a revitalisé les déjà trop calmes festivaliers avec un show visuellement attractif, puissant et délirant. Une ambiance de gitans en vacances, de folk tsigane festif et de punk virevoltant s’est installée tout de go. Un show fougueux à mi-chemin entre le cirque, le théâtre de rue et le punk acoustique qu’on croise à l’ombre des caravanes.
A 19h, c’est la tigresse Juliette Lewis, actrice reconvertie en rockeuse incorruptible, et ses musiciens The Licks, qui ont enflammé le Chapiteau à coups de rock, de refrains décapants et de solos de guitares fédérateurs. Pendant féminin d’Iggy Pop, Juliette Lewis se tort, se couche, s’assoit, s’effondre pour mieux repartir de plus belle dans l’électricité dansante et rageuse de son rock.
20h. Sous ce même chapiteau, l’ambiance est déjà électrique et des sifflements de part et d’autres témoignent de l’impatience des festivaliers venus accueillir la nouvelle coqueluche de la soul anglaise, Amy Winehouse. Cinq minutes plus tard, ce sont ses deux choristes masculins en costard qui présentent la belle. La scène est somptueusement décorée. Quatre lampes faiblement éclairées tamisent la lumière et dessinent une ambiance de cabaret jazz. Si l’ombre d’Aretha Franklin n’est jamais loin, l’Anglaise séduit autant par son agencement soul que jazz ou funk et révèle au-delà de sa voix cristalline, rebondissante et terriblement chaude un groove et une aura singuliers.
Une heure plus tard, les Rita Mitsouko faisaient leur grand retour scénique pour défendre leur nouvel album Variety. Oscillant entre anciens titres (C est comme ça, Andy), nouveaux titres pop (Rendez vous avec moi même) et reprise stonienne (Sous mon pouce), Catherine Ringer, Fred Chichin et leur orchestre ont fait valser la foule sans trop se donner de mal.
Changement de cap avec une création unique entre les Young Gods et Dälek. Les premiers font dans l’electro et le rock expérimental, l’autre dans le hip hop atmosphérique. Résultat ? Un concert à la fois noise, psychédélique et brumeux, tempéré de bribes Massive Attackiennes et de chant hip hop flirtant avec Tricky et Public Enemy. Les deux formations ont revisité pour l’occasion leurs morceaux respectifs et en ont créé de nouveaux. Un défi osé et réussi malgré un manque d’homogénéité qui a parfois dérouté le public, peu nombreux.
Passé minuit, c’est le rock gothique de Marilyn Manson qui était programmé sur la Grande Scène. Si jadis, Brian Warner, de son vrai nom, savait provoquer la masse populaire et les esprits, il nous apparaît aujourd’hui ennuyeux et presque pathétique, tellement son jeu de scène apparaît vide et ridicule (une main dans le pantalon, des tenues vestimentaires différentes à presque tous les titres). Et au-delà de son aspect visuel, il semble que le « Révérend » ait perdu sa passion qui lui donnait il y a quelques années une certaine forme de crédibilité. La seule qu’il semble avoir aujourd’hui est sa position d’entertainer désabusé qui ne sait plus quoi faire pour choquer l’Amérique et les âmes aux trop bonnes mœurs.
Heureusement qu’à 2H, notre duo frenchy Justice est venu terminer ce vendredi dans une ambiance électronique éclatante et unificatrice.
On ouvre le bal avec un Joey Starr qui arrive vingt bonnes minutes en retard mais qui est vite excusé par un show viril et maîtrisé. Puis Cold War Kids offre son rock sous le chapiteau. Armés d’un piano endiablé, de guitares en avant et d’un chant mélodique, ces quatre garçons ont offert un set aussi bien énergique que sensible. On aurait juste préféré que le chanteur, Nathan Willet esquisse un petit sourire de temps en temps…
Un rapide coup d’œil à Katel, chanteuse pop à l’esprit rock, qui ne convainc pas vraiment et l’on vient écouter la voix grave de Tom Smith, chanteur de The Editors, son rock rythmé et sa cold-wave hynotique et puissante. Plusieurs fois, ce dernier exulte sur scène. Nous aussi. Puis Bassekou Youkate est venu importer sur nos terres les sonorités acoustiques de son luth malien à quatre cordes dans une ambiance festive, chaleureuse et colorée. Ni complètement blues, ni complètement world, la musique de ce musicien a tout simplement le don de transcender les époques et les genres.
A 21h, Phoenix assurait son live pop rock et ses mélodies légères et radieuses sur la grande scène alors que Maxïmo Park a fait danser les kids et les emo-boys à la Plage. 22h, c’est la pop expérimentale de Deerhoof qui a fait sensation sur la scène de la Loggia. Le trio américain est un véritable technic band. Il développe un mélange de pop candide et de rock noisy et expérimental basé sur la déconstruction rythmique. Rapide et diablement efficace, la frappe du batteur est tout simplement époustouflante, le guitariste inspiré et la chanteuse, Satomi Matsuzaki mignonne et imprévisible.
23h. Les Queens Of The Stone Age étaient indiscutablement le groupe le plus attendu de la soirée. Privilégiant ses trois derniers albums, Josh Homme et son groupe ont fourni en une bonne heure de quoi faire siffler nos oreilles pour un moment. De l’ancien single No One Knows au tout dernier Sick Sick Sick, paru sur le nouvel album Era Vulgaris, en passant par un formidable et puissant Song For The Deaf, les maîtres du stoner rock moderne ont offert un concert toute en tension et en intensité, malgré un début de set un peu lent à démarrer.
1h. Les Suédois The Hives faisaient une escale sur la grande scène pour dévoiler leur garage-rock brut de décoffrage. Loin de perdre leur folie adolescente, les cinq trublions ont fait un retour en France fracassant en maîtrisant la scène (et les estrades) comme des chefs.
Pour finir la nuit, on s’extasie devant le duo allemand Digitalism et ses rythmes electro-rock endiablés à faire frémir nos Français Daft Punk.
Stuck In The Sound emploie puissance et énergie avec une facilité déconcertante sur les coups de 15h30 alors que Stellardrive, formation gagnante du tremplin de la Franche Contée emplissait la Loggia d’envolées post-rock rappelant tour à tour Mogwai ou Innocent X saupoudré de bribes de rock progressif saisissantes. Loney, Dear viendra ensuite gentiment titiller nos oreilles sur une pop folk lo-fi et chaleureuse mais qui peine à décoller.
17h50. TV On The Radio déchaîne son rock inspiré autant par le shoegazing, la cold wave que la pop au chapiteau. Mêlant atmosphère psychédélique, hip hop tribal et déflagrations soniques en tout genre, les Américains ont offert un concert tout en puissance, délivrant un Staring At The Sun décapant. On se redirige du côté de la plage pour s’inspirer du post-métal lourd et instrumental de Pelican, énergique et carré sur scène, juste avant d’aller se nourrir de la pop élégante et classieuse de The Good, The Bad And The Queen. Damon Albarn est à l’aise au piano comme au chant. On regrettera juste un manque d’énergie et d’entrain.
Assurément plus dansant et entraînant était le rock-dance des Londoniens Klaxons au chapiteau. Pop mélodique, rock aux refrains démoniaques chantés par une foule de spectateurs ahuris, bref, tout était calibré pour le live. Puis Air prenait le relais pour déverser sa pop électronique planante et apaisante. Calme mais hypnotique, l’ambiance synthétique qu’on mit les deux (Sexy Boy) Versaillais au chapiteau venait tout simplement d’une autre planète.
23h30. Arcade Fire monte sur scène. C’est finalement pour ce dernier concert du festival que la pluie a décidé de faire des siennes transformant ainsi le public en une masse de ponchos multicolores. L’intro est lancée sur Keep The Car Running puis No Cars Go s’enchaîne dans une puissance bienvenue avant de laisser le calme revenir sur Ocean Of Noise. La joyeuse troupe canadienne est munie d’une ribambelle d’instruments et dévoile avec une fougue et une passion communicatives des titres de ses deux albums et s’éclipse juste après un Rebellion magistral à 0h30 pour revenir ensuite sur scène sous une pluie encore battante. Vous êtes les meilleurs lance Régine Chassagne, habillée d’une robe rose, au public. Non, Madame c’était vous les meilleurs !
A l’année prochaine !
Site officiel : www.eurockeennes.fr
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