À Paris, Constantin Mashinskiy a photographié des inconnus qui croisent sa route et celle de son objectif. Pendant 365 jours, ses portraits en noir et blanc se sont affichés sur Tumblr accompagnés d’une légende lapidaire pour situer le contexte et ouvrir les imaginaires. Interview et diaporama. Tu habites Paris depuis longtemps ? Ca fait trois […]
À Paris, Constantin Mashinskiy a photographié des inconnus qui croisent sa route et celle de son objectif. Pendant 365 jours, ses portraits en noir et blanc se sont affichés sur Tumblr accompagnés d’une légende lapidaire pour situer le contexte et ouvrir les imaginaires. Interview et diaporama.
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Tu habites Paris depuis longtemps ?
Ca fait trois ans que je suis ici. Je suis né au Kazakhstan et mes parents ont déménagé en Espagne quand j’avais huit ans. J’ai grandi là-bas dans la région de Malaga. Je voulais d »abord devenir ingénieur mais j’ai laissé tomber pour devenir graphiste. Après avoir bossé pour différentes boîtes et agences de pub j’ai décidé de déménager à Paris pour me lancer en tant que freelance. J’avais déjà essayé de venir faire mes études ici, mais j’avais échoué à l’examen pour quatre petits points.
Tu travailles où aujourd’hui ? Ca fait longtemps que tu fais de la photo ?
Je bosse à La Défense dans une boîte qui développe des jeux vidéos. La photo c’est quelque chose que je fais à côté, pour moi. D’ailleurs je tiens à ce que cela reste une passion : je n’ai jamais vendu un seul cliché. J’ai appris tout gamin avec mon père sur un vieil appareil soviétique complétement manuel. On développait de petits tirages dans la salle de bain. J’ai continué un peu en grandissant avant de m’y remettre à fond il y a quelques années. Aujourd’hui je travaille essentiellement en numérique, c’est beaucoup plus simple pour le format que j’ai choisi avec une photo par jour publiée sur tumblr.
Comment est venue l’idée du projet 365 Parisiens ?
Au départ je voulais juste m’entraîner sur les portraits. J’avais l’habitude de photographier beaucoup de paysages urbains car je suis un grand fan de street photography. Il y a beaucoup de portraits dans ce type de photos alors ça m’a attiré d’essayer. Je me suis dit que ce serait un super entraînement de m’imposer un portrait d’inconnu par jour. L’idée c’était surtout de perfectionner ma technique un peu comme Picasso avec ses pommes. Toutes proportions gardées bien-sûr ! Il y a toujours une histoire, un mystère, derrière les sujets que je choisis. On discute un peu avant et j’essaie de photographier des modèles que je n’ai pas encore. Un peu comme quand on se lance dans une collection. Je choisis les sujets un peu au hasard. Parfois un simple regard peut m’attirer. Mais il m’est aussi arrivé de marcher pendant deux heures dans les rues de Paris sans trouver quelqu’un d’intéressant. Avant de te rejoindre pour l’interview j’ai pris la photo #119 : un mec dans le 18ème qui attendait sa copine à l’extérieur d’une boutique de vêtements. J’aimais bien son expression : je crois que ça le faisait chier d’être planté là, tout seul, à ne rien faire.
Comment abordes-tu tous ces inconnus ?
Simplement : « Bonjour, est-ce que je peux vous prendre en photo pour un projet artistique ? ». La plupart du temps les gens sont d’accord. Je dirais que 80% des personnes sont okay sur le principe. Ils me posent quand même pas mal de questions car ils sont un peu intrigués. Un jour, un mec en costume trois pièces à La Défense m’a pris pour un mendiant alors que je n’avais même pas eu le temps de lui poser ma question. En dehors de cette mésaventure, je n’ai pas eu de problème. J’ai pris la première photo de la série à la fin de l’année 2013, autour de Noël. Un mec m’a demandé une cigarette dans la rue et je lui ai demandé une photo de lui en échange. Il a accepté de poser pour moi en vitesse et le projet était parti.
Les photos sont assez suivies sur tumblr. Tu sais d’où viennent les clics, comment le blog a commencé à prendre de l’ampleur ?
Je n’ai rien fait de spécial si ce n’est continuer à poster les photos chaque jour depuis quatre mois maintenant. J’en avais parlé autour de moi, à mes amis et mes collègues et je les ai invité sur la page Facebook. Un projet sans Facebook aujourd’hui ce n’est pas un projet. Un jour je suis passé de 300 à 4000 followers sur tumblr en l’espace de quelques heures. En fait le site m’avait mis en homepage toute une journée mais je n’ai jamais su comment l’équipe éditoriale de tumblr est tombée sur mon blog.
Tu as gardé contact avec certaines personnes ?
J’ai des amis sur Facebook qui ont reconnu certains de leurs contacts sur le blog. J’en ai recroisé certains, ils semblaient contents de leurs portraits. J’essaie de laisser ma carte et l’adresse du blog après avoir pris les photos mais la plupart des gens ne me contactent pas. Il y a une photo qui me tient tout particulièrement à cœur : celle d’un père avec sa fille. Ca me rend triste d’imaginer qu’ils ne pourront jamais archiver ce souvenir. J’espère qu’ils tomberont dessus un jour mais j’ai de gros doutes. Dans l’ensemble, je crois que les personnes photographiées ne pourront jamais voir leurs portraits.
Propos recueillis par Azzedine Fall
Photos publiées avec l’aimable autorisation de Constantin Mashinskiy.
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