Basée à Paris, la photographe américaine Sunny Suits signe des clichés à l’intimité fiévreuse : après avoir flâné dans les rues de la capitale aux côtés de l’écrivain-dramaturge Ariel Kenig, ou du danseur Axel Ibot, elle interviewe Leslie Winer, artiste iconique multi-cartes au parcours et à la personnalité fascinante, dont l’album mythique Witch vient de […]
Basée à Paris, la photographe américaine Sunny Suits signe des clichés à l’intimité fiévreuse : après avoir flâné dans les rues de la capitale aux côtés de l’écrivain-dramaturge Ariel Kenig, ou du danseur Axel Ibot, elle interviewe Leslie Winer, artiste iconique multi-cartes au parcours et à la personnalité fascinante, dont l’album mythique Witch vient de ressortir.
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Plus on écrit sur Leslie Winer, plus on s’éloigne de la vérité. La vérité est qu’elle écrit et crée de la musique depuis 20 ans avec un son et une voix bien à elle, ce que des artistes de nombreux artistes passent leur vie à rechercher. Leslie Winer est une artiste rare. L’Américaine a trouvé la sérénité dans la campagne française où elle poursuit son travail d’écrivain et de musicienne, œuvrant aussi comme co-exécutrice de l’oeuvre de l’écrivain à l’origine de la Beat Generation, Herbert Huncke. En 2014, on l’a plus vue qu’à l’accoutumée, grâce à la publication de ses premiers livres de poésie O Walt et The Battle Against Control (Editions Derrière La Salle de Bains) et à la re-édition de son album iconique Witch (Superior Viaduct). Sa carrière de mannequin, quoique brève au début des années 80 est elle aussi iconique. Winer fut une des premières mannequins androgyne. …Son travail éditorial est régulièrement sélectionné sur les blogs de mode et les réseaux sociaux. Cette année, Winer a également surpris en devenant un des visages de la campagne Printemps-Eté 2014 de Vivienne Westwood. Interview.
Vous avez été mannequin cinq ans, au début des années 80, mais votre travail reste une référence dans une industrie de la mode qui est aujourd’hui de plus en plus “consommable”. Pourquoi selon vous, et pourquoi avez-vous décidé de vous en éloigner?
Je ne suis pas certaine que ce que vous dites soit si juste – je ne suis plus la mode ni l’industrie de la mode de très près – cela n’a jamais été une passion pour moi. Je ne suis probablement pas la mieux placée pour émettre une opinion là-dessus et cela ne m’intéresse pas vraiment.
Au début de cette année vous êtes revenue pour travailler avec Juergen Teller pour la campagne Vivienne Westwood. Que ressentez-vous de cette expérience?
J’aime Juergen Teller et j’aime son travail. C’est un être drôle et profond.
« Witch » est re-sorti cette année (Superior Viaduct). Pourquoi a-t-il fallu autant de temps pour que cet album soit reconnu comme une pièce iconique?
« Une pièce iconique », je ne sais pas – mais je suis heureuse que « Witch » ressorte en vinyle et c’est satisfaisant de savoir que des gens qui ne le connaissaient pas encore l’écoutent à présent.
Vous avez eu une longue amitié avec l’écrivain Herbert Huncke, qui est très peu connu du grand public, aujourd’hui vous êtes co-editeur /co-exécuteur de son oeuvre. Qui était Herbert Huncke, et quelles sont vos aspirations pour son travail?
Herbert Huncke est bien connu des aficionados de la Beat génération. Il est un des personnages principaux de « Junkie » de Burroughs, ou de « Sur la route » de Kerouac, il apparaît dans « Howl » de Ginsberg, entre autres. Kerouac attribuait l’invention du terme « Beat » à Huncke. Burroughs, Kerouac et Ginsberg l’ont tous rencontré quand ils traînaient ensemble autour de Columbia University dans les années 1940. Huncke les a introduits dans l’underground interlope de Times Square. C’était un junkie, un hustler et un voleur à ses heures.
Il est fort probable que les membres de la Beat n’auraient pas existé comme nous les connaissons sans Huncke. Mais ses écrits sont moins connus. Huncke était un excellent conteur. Et Jack et Allen sont allés loin pour le faire publier – avec plus ou moins de succès. Nous sommes en train de publier certaines de ses nouvelles et d’organiser et numériser ses archives. Jerome Poynton et moi sommes aussi en train de réorganiser sa semi-autobiographie « Guilty of Everything ».
Vos premiers ouvrages de poésie ‘O Walt’ et ‘ The Battle Against Control’ (Les Éditions Derrière La Salle de Bains) viennent juste d’être édités. D’autres textes vont-ils être publiés?
Oui, ils sont en train de publier une série de mes poèmes en édition bilingue. Mais soyons honnête : qui aime encore la poésie, hé? Ces poèmes sont tirés d’une collection appelée « Irish Wristwatch » et risquent de ne présenter que peu d’intérêt pour la plupart des gens. Sérieusement. Comme le dit Hölderlin: « … pourquoi des poètes en ce temps d’indigence »?
Sur quoi travaillez-vous en ce moment?
Je suis sur le point d’entrer en studio avec Christophe Van Huffel pour enregistrer de nouveaux morceaux. Nous avons déjà travaillé ensemble, joué en live (ATP, La Route du Rock, etc.) et nous avons sorti un EP (vinyle) en 2011 dont le titre est « Purity Supreme » et qui est passé largement inaperçu. Nous avons eu une excellente critique … écrite par quelqu’un qui pensait que j’étais un homme – qui avait écouté le disque sans rien connaître de moi. C’est la meilleure critique que j’ai jamais eue! La plus équitable. Il a comparé ma voix et ma performance à celle de Lou Reed et dit que je sonnais comme un « Tom Waits, légèrement plus méchant » et « quelque chose que l’on pourrait entendre si Charles Bukowski transposait son éraillement de voix en chanson. » (?!). Les usuels « femme en colère », « féministe invétérée », « dub lesbienne » et « ancienne mannequin », étaient absents de la critique, qui omettait aussi de me décrire au travers des amis masculins importants que j’ai eus ou aurais pu baiser. Ça a été une vraie révélation: le conditionnement social règne en maître. Je me demande souvent : « Quand est-ce que je serai finalement … ‘humaine’? ».(Grand sourire).
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