Il aura fallu trois ans et la participation de 37 artistes venus des 5 continents pour que l’exposition FOOD puisse voir le jour, pour la première fois à Genève en 2012, au printemps 2014 à Sao Paulo avant d’atterrir cet automne au MuCEM à Marseille, jusqu’au 23 février. Proposée par Adelina von Furstenberg, directrice de […]
Il aura fallu trois ans et la participation de 37 artistes venus des 5 continents pour que l’exposition FOOD puisse voir le jour, pour la première fois à Genève en 2012, au printemps 2014 à Sao Paulo avant d’atterrir cet automne au MuCEM à Marseille, jusqu’au 23 février.
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Proposée par Adelina von Furstenberg, directrice de l’ONG onusienne ART for The World (qui travaille sur les défis environnementaux, de santé, d’éducation), FOOD n’est pas une énième exposition sur l’art culinaire ou sur la gastronomie mais plutôt une promenade décomplexée entre une dizaine d’installations artistiques déjantées, qui posent la question de notre relation à l’alimentation, à la terre nourricière et à l’agriculture aux quatre coins du monde. Photos, films, meubles, toiles, matières premières et objets, parfois comestibles, cohabitent dans un immense espace avec baies vitrées et vue sur la mer.
Tout est permis, depuis la vulgarité avec la collection perso de santons caganers du catalan Antoni Miralda jusqu’à la provocation, dans la vidéo de 1968 de Tony Morgan et Daniel Spoerri, Beefsteak (Resurrection), qui retrace la vie d’un steak de bœuf racontée à l’envers, digestion incluse. Sont autorisés aussi le bruit, les odeurs et le politiquement incorrect. « Tout est permis, nous avons laissé aux artistes tout l’espace et la liberté dont ils avaient besoin. Le seul deal c’était que cinq d’entre eux – John Armleder, Stefano Boccalini, Antoni Miralda, Angelo Plessas et Barthélémy Togo – réalisent leurs installations sur le thème de la nourriture, mais avec des objets choisis dans la collection du musée » explique Emilie Girard, conservatrice de l’exposition et responsable du Centre de conservation et de Ressources du MuCEM.
Mètre cube de gousse d’ail
En franchissant la porte de FOOD, impossible de ne pas tiquer sur l’odeur ambiante d’ail qui émane de l’œuvre de Mircea Cantor (Roumanie) : un mètre cube de gousses d’ail, à la fois piqure de rappel historique sur l’ail comme nourriture du pauvre, rejeté à cause de l’odeur et témoignage de l’importance des matières premières nutritives.
Quelques mètres plus loin, on tombe nez-à-nez avec des filets de graines et d’épices suspendus façon cabas de ménagère ou boyaux (au choix) à travers lesquels le brésilien Ernesto Neto conseille de déambuler pour voir de plus près, sentir et toucher ; une sorte d’invitation au voyage sensoriel en forme d’apologie des matériaux venus tout droit de la terre (haricots, épices, riz, etc).
Derrière une vitrine en verre, l’artiste allemand Meret Oppenheim a sélectionné puis détourné plusieurs objets du quotidien des années 1960 comme les fameuses bouteilles de Coca sur lesquelles sont inscrits des slogans anti-impérialistes comme « Yankees go home » ou la chope de bière années 1970 à queue d’écureuil, clin d’œil au surréalisme de Duchamp et censée provoquer le désir autant que le dégout.
Canettes usagées rachetées à des SDF
Chaque œuvre délivre un message singulier sur la nourriture dans notre société contemporaine, les valeurs qu’elle véhicule depuis le siècle dernier et les défis qu’elle engendre comme le développement durable, l’immigration, les inégalités économiques et sociales. A commencer par celle de l’hyper consommation dénoncée par Eduardo Srur (Brésil) à travers sa vidéo Supermercado dans laquelle il se promène dans des rayons de supermarchés et consomme les produits directement sur son corps. Pied de nez à la culture de l’excès et du gaspillage.
Même combat pour le collectif d’artistes français Claire Fontaine qui fait l’apologie du recyclage des déchets qui ne cessent d’augmenter du fait de leur packaging volumineux en accrochant au plafond des sacs poubelle transparents de 200 litres remplis de canettes de soda vides ; canettes rachetées à des SDF de San Francisco qui les récoltent quotidiennement pour les vendre à des centres de recyclage.
L’artiste américain Nari Ward est, quant à lui, parti du paradoxe de l’explosion de la communication virtuelle et de l’érosion de la communication réelle pour créer son installation : le Transtranger café. Sorte de manifeste pour un retour à la sociabilité autour du café. Plusieurs tables en bois, desquelles pendent des tasses accrochées, se chevauchent et au sommet trône une pyramide de mar de café qui s’écoulent lentement. Le message transmis par Nari ward à travers cette installation est clair et prend la forme d’un manifeste pour que le café retrouve sa fonction primaire et noble de sociabilité et d’échange.
Exposition FOOD, jusqu’au 23 février 2015.
MuCEM esplanade du J4, Marseille.
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