En 2005, Maxïmo Park avait frappé un grand coup avec A Certain Trigger. Cette année, c’est avec Our Earthly Pleasures que Paul Smith et sa troupe comptent bien mettre l’Angleterre sans dessus-dessous. Rencontre avec le bondissant (et bavard) chanteur de Maxïmo Park. En prime, découvrez le clip de Our velocity et écoutez le titre .
Qu’en est-il de Our Earthly Pleasures, votre nouvel album ? Il est très différent de A Certain Trigger
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Nous avons beaucoup progressé, changé, mais cela reste Maxïmo Park. Le son est toujours le même, ma façon de chanter aussi, les paroles sont du même genre que celles du premier album. Je pense que la première fois que tu écoutes le disque, tu peux penser que c’est un peu différent de ce que nous avons pu faire jusqu’à présent, que c’est plus lourd, plus fort, mais je suis fier de ce disque. Nous avons réussi à mélanger ce que nous faisions avant avec les nouvelles idées que nous avions. Je trouve ça tout à fait légitime d’avoir envie de faire des disques qui sonnent différemment. Cela ne servait à rien de faire un second A Certain Trigger. Bien sûr, nous étions peut-être un peu sous pression, mais je ne voulais pas offrir aux gens deux fois la même chose. Je pense que nous avons fait le bon choix.
Pourquoi avoir choisi de travailler avec le producteur Gil Norton ?
J’aime travailler avec des gens qui sont dans la musique pour le plaisir, et non pas pour l’argent. Gil Norton est quelqu’un de très humain, qui a très vite compris ce que nous voulions. Quand on lui proposait une nouvelle chanson, il savait exactement ce que nous recherchions. C’est quelqu’un qui a toujours beaucoup d’idée au niveau des arrangements… Et de plus, contrairement à d’autres, il n’avait pas peur de nous dire que tel ou tel morceau avait besoin d’être retravaillé ou amélioré. Il sait reconnaître le potentiel d’une chanson. Pendant l’enregistrement, nous lui avons fait entièrement confiance. Il a travaillé avec les Pixies et les Foo Fighters donc je savais qu’il nous aiderait à donner un son plus « heavy » à nos chansons.
Dans quel état d’esprit étais-tu lorsque vous avez commencé à enregistrer les démos de Our Earthly Pleasures ?
A la fois terrifié et impatient. C’était très excitant de pouvoir enfin travailler sur des chansons qui tournaient dans nos têtes depuis deux ans. Il s’agissait surtout de ne pas être obsédés par le premier album. Nous devions nous détacher de tout pour composer un album nouveau, et surtout ne pas se dire « Je veux jouer comme John Lennon ou je veux chanter comme Morrissey ». Si tu pars en pensant ce genre de choses, ce sera forcément un échec.
Où s’est déroulé l’enregistrement ?
Nous avons enregistré les démos à la maison, à Newcastle, puis nous les avons donné à Gil qui est venu nous rejoindre pour travailler avec nous. Nous sommes ensuite allés à Londres pour enregistrer la version définitive de l’album. C’était un très bon moment pour nous parce que nous savions exactement ce que nous devions faire. Le matin, je me levais, j’allais voir s’ils avaient besoin de moi, et si non, je partais me balader, visiter des musées.
Vous aviez décidé de prendre votre temps ?
Pour le premier album, nous devions bouclé l’enregistrement -mixage compris- en deux semaines parce que la location d’un studio coûte cher et que nous n’avions pas beaucoup d’argent. A Certain Trigger a ainsi été enregistré au milieu de la nuit, parce que le temps venait à manquer. Durant l’enregistrement de Our Earthly Pleasures en revanche, nous n’avons pas travaillé plus tard qu’une heure du matin, et nous pouvions profiter de nos week-end. Je crois que cela nous a pris deux ou trois mois, ce qui est à peu près dans les normes pour un groupe.
Vous avez même eu le temps de jouer aux côtés des Rolling Stones. Comment cela s’est-il passé ?
C’était à la fois bizarre et génial. Je n’aurais jamais imaginé jouer un jour devant plus de cent mille personnes. C’était une expérience incroyable Dans le fond, je crois qu’on était juste contents de rencontrer les Rolling Stones ! Ils sont très gentils… et vieux ! (rires)
Tous vos prochains shows en Angleterre sont complets. Comment réagis-tu face à un tel engouement ?
Les places se sont vendues en quarante-cinq minutes ! C’est fantastique de se dire que des centaines de personnes veulent nous voir alors qu’ils n’ont pas encore entendu le nouvel album. Nous avons joué certaines chansons lors des festivals auxquels nous avons participé cet été, et le public a l’air de les avoir appréciées’ Cet album est plus recherché, plus dynamique, plus novateur. Je sais que certains seront déçus par Our Earthly Pleasures, mais je jouerais ces chansons jusqu’à la fin de mes jours, que quelqu’un les écoute ou pas ! (rires)
Où as-tu grandi ?
J’ai grandi dans une petite ville à une heure de Newcastle, et je ne l’ai quitté que lorsque je suis entré à la fac. A Certain Trigger est en partie inspiré de cette volonté de m’échapper de cette ville. En réalité, je pourrais dire que j’ai grandi à Newcastle car c’est là-bas que je suis devenu une vraie personne. Quand j’y ai déménagé, j’ai rencontré beaucoup de gens, appris beaucoup de choses.
Il paraît que tu as été professeur avant d’intégrer Maxïmo Park ?
Oui, c’est vrai. J’ai fais pas mal de choses en réalité en arrivant à l’université. D’abord, je suis allé à la faculté d’arts, puis, j’ai été étudiant en linguistique anglaise, et pour finir, j’ai fait un master en culture et histoire sociale des Etats-Unis. J’étudiais la poésie, la littérature et la musique américaine. J’ai beaucoup travaillé sur l’histoire de la pop et du rock.
Et aujourd’hui tu en fais partie
Il semble que Maxïmo Park fait désormais partie de cette grosse machine, oui Mais être sur un petit label nous permet quand même de rester un peu en dehors de toutes les exigences commerciales. Nous occupons une position enviable, assez unique. C’est très difficile d’arrêter cette grosse machine une fois quelle est lancée, mais je me sens libre de le faire si ça me chante. Mon but premier est avant tout d’écrire des chansons et de les chanter sur scène. En parler ne passe qu’au second plan pour moi, mais comme je veux toucher le plus de personnes possible, il faut forcément entrer dans la « grosse machine ».
Comment as-tu découvert la musique ?
Je crois que ce sont mes premières sorties qui m’ont fait découvrir la musique, lorsque je suis allé pour la première fois dans des magasins de disques. Le premier album que j’ai acheté était Listen Without Prejudice de Georges Michaël ! (rires)
Ton rapport à la musique était très obsessionnel à l’époque semble-t-il’
Je suis quelqu’un de très passionné, et j’étais totalement obsédé par la musique. Tout mon argent y passait. C’est longtemps resté quelque chose de très intime, puis quand je suis entré à la fac, à dix-sept ans, j’ai pu partager ma passion avec d’autres. Nous écoutions Radiohead, nous avions tous acheté Ok Computer et nous sommes même allés à Glasgow pour les voir en concert. On a vu Mogwai, Arab Strap et tous ces groupes qui nous passionnaient. Peu à peu, je me suis mis à écrire des chansons pour exprimer ce que j’avais au fond de moi, comme tout le monde. J’ai fait quelques concerts, seul avec ma guitare, et c’est à ce moment là que les membres de Maxïmo Park m’ont vu sur scène et m’ont demandé d’être leur chanteur.
Quels concerts t’ont marqué quand tu étais plus jeune ?
Radiohead, DJ Shadow, le Teenage Fanclub. Plus récemment, j’ai revu Cat Power, et c’était fabuleux, beaucoup mieux que la première fois que je l’avais vu. Cette femme est vraiment incroyable Je me rappelle avoir vu Low à Newcastle. C’était probablement le meilleur concert que j’ai jamais vu. Tous les gens étaient assis et silencieux. Je garde aussi un souvenir incroyable de Godspeed You! Black Emperor, de Shellac et de Bonnie Prince Billy.
Qui sont tes héros ?
Aujourd’hui, Arthur Russell. C’est un chanteur, compositeur et violoniste américain qui sévissait durant la période disco. Il faisait ce qu’il voulait, et c’est sûrement la meilleure musique que j’ai jamais entendu’ Sinon, quand j’étais adolescent, je vénérais Morrissey. J’avais des poster de lui accrochés sur les murs de ma chambre. C’est une icône. Il ne ressemble à personne d’autre. Il était brillant avec les Smith, et il a continué d’être brillant en solo.
Beaucoup disent que tu as la même présence scénique que lui…
Sur scène, je fais ce que je veux, et je crois que c’est aussi ce qu’il fait. C’est peut-être pour ça que certains me comparent à lui. Et puis, si je dois être comparé à quelqu’un, je préfère que ce soit à un des meilleurs chanteurs du 20ème siècle ! (rires)
A quoi te sert ce petit carnet rouge que tu sors régulièrement sur scène ?
En fait, c’est un très vieux carnet que j’ai toujours sur moi. J’écris pas mal de choses dedans, j’y mets les setlist durant les concerts, et il y a même les paroles de mes chansons au cas où. Ca me donne confiance de l’avoir avec moi sur scène je crois. Il n’y a pas très longtemps, je l’ai perdu, mais heureusement, quelqu’un l’a retrouvé et me l’a rapporté.
Ton carnet s’appelle le « red book » et ton groupe Maxïmo Park ; ce sont des références directes au communisme. C’est une forme d’engagement politique ?
Pas vraiment non… Je lis les journaux, je me tiens au courant, mais c’est tout. Ces références sont simplement symboliques. Nous essayons de mener notre petite révolution de la pop, et c’était une façon imagée de le faire savoir. (Ironique) Malheureusement, je crois qu’on ne sera jamais aussi populaire que le communisme !
Que penses-tu des groupes qui se servent de leur musique pour faire passer un message politique ?
Les groupes qui écrivent des chansons politiquement engagées ne me dérangent pas à partir du moment où cela ne sonne pas faux. Les Clash l’ont fait d’une façon incroyable par exemple. La meilleure chanson contre la guerre que j’ai entendu est Shipbuilding d’Elvis Costello. C’est une chanson très humaine, qui raconte une vrai histoire. C’est très dur d’écrire de bonnes chansons engagées, mais les nôtres le sont d’une certaine façon… Our Velocity parle des gens qui tentent de résister à la pression collective et à la consommation excessive par exemple. Je ne suis pas insensible à ce qui m’entoure, et j’espère que cela se sent dans mes chansons.
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