Monsieur le ministre revient
à la musique, à ses racines nordestines,
et c’est un bonheur.
Le temps de légiférer sur le téléchargement gratuit des artistes de son pays, et Gilberto Gil a donc abandonné le maroquin de ministre de la Culture brésilien, soigné un méchant polype aux cordes vocales et décidé de retourner vers ses racines musicales. C’est ce Nordeste qui a appris au chanteur la puissance de la musique, et qui célèbre par le festival de São João la fin de la saison humide, et le début des moissons, le tout rythmé par le baião, schéma rythmique dans lequel se mêlent musique bantoue et mélodies portugaises.
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C’est donc dans une ambiance agreste, où rayonnent accordéon, violon, cordes pincées et percussions de poche, que le soixantième album (environ) de Gil déroule ses fastes. Des fastes modestes comme une fête de village, ou une procession religieuse acoquinée à des déhanchements lascifs, mais une célébration lumineuse, comme un chant d’évidence.
Qu’il rende hommage au maître du genre Luíz Gonzaga (dans le trépidant A dança da moda) ou nous entraîne dans une farandole juvénile (São Jão Carioca), Gil offre une nouvelle verdeur à ce genre populaire. Peu de moyens (le triangle en contrepoint de lutin des sonorités d’un sitar dans Lã vem ela), mais un immédiat effet roboratif, d’autant que le Bahianais ne laisse à personne le soin de rappeler qu’il reste l’une des figures majeures du tropicalisme (Fé na festa), rencontre harmonique entre musique pop et Brésil.
L’un des sommets de l’album reste O livre-Atirador e a peçadora, délicieuse évocation en mineur des baisers volés de l’adolescence, un âge que le quasi-septuagénaire prolonge ici avec grâce. On retrouve une identique simplicité dans la versification, qui dit en quelques mots les espoirs et combats du quotidien. Un disque qui ne change pas le monde, mais qui y laisse briller une douce lumière humaniste.
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