Originaire de Sierra Léone, l’Allemand Patrice revient : fragmenté et inégal, malgré des poussées de génie : critique et écoute.
2010 est une année féconde pour Patrice. Marié à la chanteuse Ayo, l’artiste allemand d’origine sierra-léonaise vient de goûter pour la deuxième fois aux joies de la paternité, heureux événement suivi par la sortie de ce sixième album, qu’il n’hésite pas à présenter comme son meilleur. Et c’est vrai en partie : One contient certaines des chansons les plus mélodiques et les mieux orchestrées de son répertoire.
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Joyau du disque, le superbe Walking Alone, aux amples mouvements de cordes, entraîne l’auditeur dans un poignant tourbillon introspectif. Mouillant dans les mêmes eaux symphoniques, et toujours accompagné par les Demon Strings, The Maker, blues lent aux reflets trip-hop fait songer à la manière dont Tricky pourrait adapter George Gershwin. Sur ces deux titres, Patrice se montre à son avantage sans doute parce qu’en faisant appel à la part de souffrance en lui-même, il s’oblige à dépasser les limites d’une imagination musicale trop habituée à naviguer à l’intérieur d’un éternel triangle d’influences, entre folk, soul et reggae.
Dans un même élan d’audace et de vérité, il s’expose comme jamais pour humilier son ego. D’abord sur Ain’t Got No (I Got Life), une reprise inspirée de Nina Simone ; puis sur Kingfish, ragga tribal et incisif. Sur ce dernier, lui qui hier chaussait volontiers les godillots du militant (Murder, Moneypulition) avoue n’avoir aucun message à délivrer et faire parti d’une génération qui n’a rien à dire. Ce que la suite du disque tend à confirmer hélas. Car passé ces quatre premiers morceaux, Patrice tombe assez souvent dans la précipitation (Wiggle & Rock) ou cède à la facilité (Nobody Else’s, Nothing Better), prouvant au passage combien il est difficile de chanter l’amour béat (surtout quand on ne s’appelle pas Stevie Wonder ou Paul McCartney).
Enregistré entre Londres, Cologne, le New Jersey et la Jamaïque, One ressemble finalement au portrait de l’artiste sur le livret : un visage recomposé à l’aide d’une mosaïque de baffles en pleine forêt, l’image même d’une âme fragmentée, voire éparpillée, toujours à la recherche d’une unité.
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