Il sort « Mon histoire vraie », un livre-puzzle qui parle de ses films, de sa vision du monde et de son dada, la méditation. De passage à Paris, il évoque Cannes, Barack Obama, les séries télé et les milk-shakes.
Pourquoi avez-vous eu envie d’écrire vos mémoires ?
David Lynch
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Le livre est plus “parlé” qu’écrit. Il résulte d’une tournée des universités que j’ai réalisée aux Etats-Unis. J’y allais, les étudiants me posaient des questions. Il est né de ces échanges. C’est la première fois que je parle aussi ouvertement et longuement de méditation.
Vous avez médité ce matin ?
Bien sûr ! Comme tous les jours, deux fois par jour depuis 1973. Je n’ai jamais manqué aucune séance, que je voyage ou que je tourne. Les gens ont beaucoup d’idées fausses et préconçues sur ce qu’est la méditation transcendantale. Ce n’est pas de la concentration, ce n’est pas quelque chose de difficile. Pour méditer, vous avez juste besoin qu’on vous enseigne la technique, c’est tout. Le bruit extérieur n’est même pas un obstacle. Asseyez-vous confortablement, fermez les yeux et tout d’un coup : boum ! C’est merveilleux : vous parvenez à un état de conscience supérieure et de bonheur intense, qu’on atteint normalement pendant les phases transitoires de sommeil.
Vous serez à Cannes ?
Non, ma fille présente un film cette année, Surveillance, chacun son tour ! Je la soutiens de loin, c’est mieux. Je n’ai pas encore pris connaissance de la Compétition, mais je suis toujours curieux de ce qui se passe à Cannes. Je pense que Sean Penn sera un bon président. J’ai eu la chance de l’être. C’est une grande expérience, même si je ne le referais pas ! C’est beaucoup de responsabilités. Mais curieusement, je ne ressentais aucune pression. Les choix du jury sont subjectifs, c’est une expérience de liberté.
Avec Twin Peaks, vous êtes le père des séries modernes. Quel regard portez-vous sur leur évolution ?
J’adore Six Feet under et surtout Les Soprano. J’étais si triste quand cela s’est arrêté. J’adore la série en tant qu’expérience d’un monde continu. Je regarde les séries en DVD, très peu à la télé. Je ne sais pas si Twin Peaks aura une suite un jour. Tout est possible, naturellement. De toute façon, je pense qu’internet est le futur de la télévision. C’est juste une question de temps. Très bientôt, télécharger un film sera aussi rapide qu’un MP3. Je crois que les studios doivent être très nerveux, parce que c’est vraiment difficile de faire quoi que ce soit. Dès que tu inventes un système d’encodage quelqu’un le brise.
Suivez-vous la campagne américaine ?
Oui. Je suis pour Barack Obama. On dit souvent qu’un président est un miroir de la conscience collective d’un peuple. En Amérique, l’état de conscience a donc été très bas ! Bush a été atroce et je crois qu’on ne connaît pas le dixième de ses actions. Obama n’est pas dans ce système. C’est une nouvelle voix. Pour moi, c’est le seul qui a une chance de changer les choses. Hillary a peut-être une infime possibilité, McCain pas du tout.
Vous jouez toujours de la musique ?
Oui, j’ai commencé à chanter, c’est nouveau pour moi. Je ne sais pas quand mon disque sortira, parce que je travaille sur des peintures, des photos, et à un documentaire sur la méditation. Là, j’écoute le nouveau Portishead, quel son ! J’adore Au Revoir Simone, que j’ai rencontré à New York. Et aussi Danger Mouse de Gnarls Barkley.
Où allez-vous rêvasser à Los Angeles maintenant que Bob’s Big Boy, votre chaîne de café préférée, a fermé ?
Celui de Sunset a fermé, mais il en reste deux ! Une chose terrible est arrivée dans un des Bob que je fréquentais. Un type a tiré sur les gens. Mais quelque chose d’autre m’a poussé à arrêter de fréquenter les Bob. Je venais chaque jour prendre mon milk-shake à 14 h 30. Puis je m’asseyais et dessinais, laissais les idées défiler dans ma tête. Je ne m’étais jamais trop demandé ce qu’il y avait dans mon milk-shake, jusqu’à ce jour où j’ai fouillé dans la poubelle et trouvé un des emballages. C’était horrible : pas un ingrédient naturel ! Ça a été la fin des Bob pour moi !
Propos recueillis par Serge Kaganski et Géraldine Sarratia
{"type":"Banniere-Basse"}