Un nouveau collectif féministe baptisé Insomnia part en lutte contre la marque de bagels Bagelstein qu’elle accuse de sexisme. Interview.
Elles n’ont pas de site Internet. Juste une page Facebook lancée le 18 juin,, likée par 853 personnes et sur laquelle elles postent le récit de leurs actions. 24 au total, menées en une seule nuit, entre le 16 et le 17 juin, contre des enseignes de la marque Bagelstein, dont les dernières campagnes de communication et de marketing étaient hautement sexistes. Elles souhaitent conserver l’anonymat, expliquent être « une trentaine« , « toutes à Paris pour le moment« , et avoir entre 18 et 40 ans.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Pourquoi avez-vous lancé Insomnia ?
Nous avons créé le groupe féministe Insomnia en réaction au marketing sexiste, homophobe, misogyne et raciste utilisé par la chaîne de restauration Bagelstein. Nous sommes plusieurs à être scandalisées par la désinvolture avec laquelle la marque plaisante sur des sujets aussi graves que le viol ou les violences subies par les femmes.
Pourquoi créer un nouveau groupe féministe alors que beaucoup existent déjà ?
Notre singularité réside dans notre mode d’expression: nos actions sont nocturnes, ciblées, symboliques et pacifiques. Nous sommes convaincues qu’à l’ère de l’image et du buzz, une interpellation directe et visuelle des enseignes sexistes est un moyen de dénonciation extrêmement efficace.
Quel est votre mode opératoire ?
Notre mode d’action se veut percutant visuellement et symboliquement. Nous créons des visuels simples et efficaces afin de dénoncer mais surtout d’éveiller les consciences. Nous réalisons des collages antisexistes massifs dans des lieux symboliques. Nous agissons de nuit, dans la plus grande discrétion et de façon anonyme. Nous préparons soigneusement nos actions afin de transmettre nos messages le plus efficacement possible.
Vous engagez vous également pour la défense des quatre jeunes emprisonnés dans « l’affaire du Bagelstein de Rennes » ?
Concernant l’affaire de Rennes, nous soutenons entièrement l’initiative de départ. Ces personnes se sont insurgées publiquement contre le marketing sexiste et homophobe de Bagelstein, ce qui est un excellent signe: nous ne sommes pas nombreux-ses dans la lutte antisexiste. Nous sommes également scandalisées que la démarche de dénonciation des propos sexistes de Bagelstein ait à peine été prise en compte lors de la comparution des 4 militants mais qu’il leur ait été reproché leur engagement dans la lutte anti loi travail, alors que ces deux sujets n’ont rien à voir. Les circonstances et causes de l’arrestation n’étant cependant pas des plus claires, nous tenons à préciser que nous sommes un groupe pacifique et nous ne cautionnons en aucun cas la violence.
Avez-vous contacté la direction de Bagelstein ?
Nos actions visent à interpeller les enseignes et les autorités de contrôles. Lors des dernières semaines, des manifestations de centaines de personnes ont eu lieu à Rennes et à Nantes contre la marque et nombreuses sont les associations féministes à s’être mobilisées – les Chiennes de Garde ayant par exemple porté plainte auprès du Jury de Déontologie Publicitaire.
Nous partons du principe que l’enseigne est parfaitement consciente des critiques qui lui sont adressées mais qu’elle ne juge pas utile de changer sa communication publicitaire sexiste pour autant. Nous avons donc choisi l’action comme mode de contestation, par le biais d’un collage massif d’affiches pédagogiques dans le but de médiatiser l’affaire et de sensibiliser le plus de personnes possible. Nous pensons que notre action est nécessaire car spécifique, d’autant plus qu’elle s’inscrit dans le combat mené par la communauté féministe qui dénonce les méthodes de l’enseigne Bagelstein et qui l’attaque de plein front.
Pourquoi souhaitez-vous conserver votre anonymat ?
Nous agissons en tant que collectif et non en tant qu’individus. Nous œuvrons au nom de toutes les anonymes qui s’insurgent contre le sexisme des enseignes et l’impunité dans laquelle certaines s’enrichissent sur l’oppression et les discrimination subies par les femmes au quotidien. L’anonymat est une de nos forces, elle donne à nos actions une portée symbolique bien plus impactante que si nous dévoilions nos identités.
Comment fait-on du coup pour vous rejoindre ?
Si vous souhaitez nous rejoindre, que vous soyez parisienne ou non, vous pouvez nous envoyer un mail à insomniarevolution@gmail.com ou bien nous contacter par message privé sur notre page Facebook Insomnia.
Etes-vous un groupe mixte ?
Non, nous avons décidé d’agir en tant que femmes car ce sont elles les victimes du sexisme au quotidien. Il s’agit d’une façon pour nous de montrer que nous sommes capables de riposter nous-mêmes aux propos qui tournent nos souffrances et celles de toutes les femmes en ridicule.
Ne pensez-vous pas que ce type d’actions sont trop minimes pour pouvoir influer sur les décisions de grandes chaines comme Bagelstein ?
Notre but est d’alerter les gens, de leur ouvrir les yeux. C’est d’ailleurs en partant de cette idée que nous avons choisi le nom Insomnia: nous agissons de nuit car nous ne pouvons dormir tranquille en sachant que des enseignes font du profit en se basant sur un marketing sexiste. Nous refusons de fermer les yeux devant le sexisme ordinaire et souhaitons que chacun.e se réveille et agisse.. Nos actions, très visuelles sont un moyen d’interpeller les gens dans la rue et sur les réseaux sociaux afin de les faire réfléchir et prendre conscience du problème que nous pointons. Nous espérons également, dans les actions futures, avoir un relais médiatique important afin de toucher plus de monde. Nous pensons qu’une enseigne comme Bagelstein est préoccupée par son image auprès du public, et suite à notre action, de nombreuses personnes ont déclaré sur notre page facebook qu’elles boycotteraient désormais Bagelstein. Nous avons collé nos affiches et écrit notre slogan sur 24 magasins, nous doutons que cela soit passé inaperçu aux yeux de la direction.
{"type":"Banniere-Basse"}