A l’ami qui vous demande si les Warlocks sont des “gentils” ou des “méchants”, répondez simplement que les Warlocks sont des types qui sont susceptibles de fabriquer autant d’illuminés que de dépressifs et que l’écoute de leurs disques doit donc se faire sous surveillance. Déjà parce que ces Californiens jouent très fort, et qu’on risque […]
A l’ami qui vous demande si les Warlocks sont des « gentils » ou des « méchants », répondez simplement que les Warlocks sont des types qui sont susceptibles de fabriquer autant d’illuminés que de dépressifs et que l’écoute de leurs disques doit donc se faire sous surveillance. Déjà parce que ces Californiens jouent très fort, et qu’on risque souvent d’y laisser une oreille ou même deux. Sur Surgery comme sur leurs deux précédents albums (Rise and Fall et The Phoenix Album), ils s’essaient toujours à mettre en branle une sorte de « mur du son » à coups de guitares et de drogues ? et forcément, ça fait du bruit, beaucoup.
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D’autant plus que pour cette fois, l’expression « mur du son » a vraiment été prise au pied de la lettre : le groupe de Bobby Hecksher (grand pote de Beck et de Rivers Cuomo de Weezer) a demandé à son producteur Tom Rothrock de jouer pour de vrai son Phil Spector et de mettre des micros sur tous les instruments que Dieu a mis dans un studio. C’est assez ambitieux et au final plutôt réussi. Quand on écoute bien les titres Angels in Heaven, Angels in Hell, ou encore Evil Eyes Again, les Warlocks peuvent honnêtement ressembler à des Ronettes reformés par des hommes de l’espace, donc en apesanteur : sur des mélodies superbes et ciselées, les guitares s’enchevêtrent avec grâce, pour donner corps à une matière sonique éblouissante, idéale pour profiter du lever du soleil (mais vu d’une autre planète).
Sauf que les Warlocks sont naturellement moins cheesy que la plupart des groupes produits par le vieux Spector et que Bobby Hecksher ? un type pas toujours bien dans sa tête ? a tenu a injecter dans cette construction faussement sereine toute une série d’ambiances et de références futuro glauques à la David Cronenberg ou à la J.G. Ballard (pour se convaincre de cette schizophrénie, il suffit d’écouter Hecksher siffloter sur l’évocateur Suicide Note). Juste derrière les jolis lumignons qu’allume par endroits Surgery se trouvent ainsi d’inquiétantes zones d’ombres soniques, que les Warlocks explorent à la lampe à pétrole, inventant au fur et à mesure une sorte de shoegazing d’outre-tombe.
Les Warlocks de 2005, c’est vraiment ça : My Bloody Valentine qui croupit en enfer, Spacemen 3 dans la cave de la famille de Six Feet under ou The Jesus And Mary Chain contre Dracula. Mais le tout avec une incroyable tenue. Car là où beaucoup de groupes se seraient roulés dans la série B gothique, eux prennent le chemin des catacombes avec une rare élégance, s’offrant une superproduction qui effraie, mais qui peut faire aussi beaucoup de bien, fonction de comment on a peur dans le noir.
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