Le mondes du cinéma et de la télévision est en deuil suite à la disparition d’un amoureux du 7e art aux talents de transmissions précieux.
A l’instar de Patrick Brion, son concurrent ami et collègue de la télévision de service public, Claude-Jean Philippe fut un transmetteur essentiel du cinéma vu selon sa facette artistique plutôt qu’industrielle. Alors que Brion officiait le dimanche à 22h30 (après minuit aujourd’hui) sur la 3 (c’était et c’est toujours Le Cinéma de minuit), CJP apparaissait sur la 2 le vendredi vers 23 h, après Apostrophes (c’était le Cinéclub). Dans les dernières années de ce programme défunt (1971 – 1994), Pivot et CJP se passaient concrètement le relais, le premier interviewant le second sur le film à venir, après la pub et le JT de la nuit, petit rituel sympathique entre passeurs cathodiques faisant partie des meubles du salon.
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Le grand cinéma pour tous
Si Brion favorise le cinéma américain et de genre, les chemins de traverse de l’histoire du cinéma, Claude-Jean Philippe (né Claude Nahon) était plutôt porté sur les grands auteurs canonisés avec ses cycles Renoir, Bergman ou Fellini. Pour un jeune cinéphile parisien des années 70-80, le Cinéclub était un parfait complément à la vaste offre des salles parisiennes, un moyen aussi de découvrir les grands films sans nécessairement faire l’effort de sortir et de se taper les files d’attentes plus longues du vendredi soir.
Mais la mission de Claude-Jean Philippe fut surtout d’amener le grand cinéma vers les foyers qui n’y avaient pas accès, pour cause d’éloignement géographique, sociologique ou culturel. Innombrables sont les réalisateurs, acteurs ou scénaristes qui ont confié avoir découvert avec ravissement le cinéma par l’entremise du Cinéclub et du Cinéma de minuit, ajoutant que les films qui y étaient montrés n’existaient pas dans leur proximité géographique et culturelle.
Claude-Jean Philippe eu d’autres activités dans sa vie (animateur-producteur à France Culture, auteur de livres de cinéma et de documentaires…), mais la plus essentielle fut ce Cinéclub, incarnation de ce que peut et devrait toujours être la télévision dite de service public : un outil de masse qui tire vers le haut et qui fédère par l’exigence (et le plaisir !), soit “l’élitisme pour tous” selon la belle formule de Jean Vilar. Claude-Jean Philippe fut ce genre de passeur populaire comme il n’en existe quasiment plus aujourd’hui, faisant reculer les déterminismes socio-culturels et avancer le “vivre ensemble”.
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