C’est l’un des poncifs les plus hilarants du wok and woll : un groupe, après un carton interplanétaire ou dans le creux de la vague, annonce le menton volontaire et la main levée que, promis, il ne se répétera pas. Ho, ho, ho. Facile de claironner sa révolution, bien plus ardu de la mettre en […]
C’est l’un des poncifs les plus hilarants du wok and woll : un groupe, après un carton interplanétaire ou dans le creux de la vague, annonce le menton volontaire et la main levée que, promis, il ne se répétera pas. Ho, ho, ho. Facile de claironner sa révolution, bien plus ardu de la mettre en forme ; beaucoup rentrent finalement dans le rang et ravalent leurs prétentions, se contentant d’une très conservatrice copie carbone des exploits passés. On peut être les éternels jouvenceaux de la pop anglaise, avoir commencé à l’âge des premiers poils, achever à peine sa croissance et désirer, déjà, se ranger des bagnoles. Ainsi, quatre albums en poche et des envies d’ailleurs dans la tête, les Supergrass affirmaient récemment vouloir se défaire de leurs habits de singes malins pour endosser ceux de sages crédibles.
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Une fois n’est pas coutume, les annonces enflammées étaient sincères : Road to Rouen, élaboré en semi-retraite dans la campagne normande, présente un profond et surprenant contre-pied. Majoritairement acoustique et étonnamment organique, plus posé et ? Dieu ! ? adulte que ses gigoteurs d’aïeuls, il est d’apparence lisse mais de constitution complexe. Les premières écoutes, dubitatives, font lever des sourcils inquiets : où est passée la fulgurance sonique ? Pourquoi ça va moins vite ? A quel moment se met-on à bondir en tous sens comme des dégénérés ? C’est quand qu’on rigole ?
Puis, rapidement et sans grand effort, le palais s’habitue au sucre plus suave du Supergrass nouveau. On retrouve ainsi, une à une, sous une production ample et ronde, moelleuse et radiophonique, les habituelles trouvailles géniales, les mélodies attrape-tout (Sad Girl, le single dépouillé St. Petersburg, Kick in the Teeth) ou quelques structures invraisemblables (l’étonnante ouverture Tales of Endurance, le final ébouriffant de Roxy). La placidité feinte de leurs morceaux ne les a absolument pas ablatés de leur formidable malléabilité, de leur dynamique hautement énergétique ; du rock puissant et élastique, Supergrass a conservé les propriétés farfelues de superballes rebondissantes. En troquant leur impétueux coupé sport pour une berline familiale tout confort, les Anglais font paradoxalement le choix du danger : la route qu’ils tracent brillamment a rarement été, pour eux, aussi sinueuse.
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