À Cannes, il faut se méfier des montées comme des descentes.
En plus des adresses des lieux où se trouvent les fêtes, les cartons devraient indiquer leurs altitudes – à tout le moins quand ça se passe, comme pour celle que donne Saint Laurent pour le film de David Cronenberg, Les Linceuls, dans le somptueux Pavillon de Flore, où Picasso vécut six ans, peignit La Baie de Cannes, et où je fais la tragique erreur de me rendre à vélo.
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Sorti ruisselant d’une ascension qui ferait passer le mont Ventoux pour un dos-d’âne, j’ai à peine le temps de récupérer mon maillot à pois, avant de me glisser parmi une panoplie de divinités sans sudation aucune – le body horror, ce soir, c’est moi. Il y a bien sûr Cronenberg, Cassel, Kruger, qui envoûtent les lieux de leur aura ; il y a même Pablo – pas Picasso, juste Pillaud-Vivien, le chroniqueur de BFM, on s’en contentera. En bons montagnards, les frères Larrieu m’infligent une conversation randonnée, comme si j’étais d’humeur.
Soudain, je pense à Sophie Calle : si la plasticienne n’avait pas, pour sa récente expo au musée Picasso, empaqueté tous les tableaux du maître, j’aurais pu y voir La Baie de Cannes, constater qu’il était peint d’assez haut, et envisager un autre véhicule. Heureusement, ici, il n’y a pas que les montées, il y a aussi des descentes : la mienne est extatique, au plus profond d’une nuit silencieuse, filant comme le vent sans un seul coup de pédale, manquant de me tuer à chaque virage tel Cooper Hoffman s’échappant des hills dans Licorice Pizza. Demain, je reviens à vélo.
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