En plus de vingt ans d’investigation et quatre livres, l’Américain est devenu une référence sur le monde du crime organisé au Japon.
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Journaliste d’investigation de la trempe d’un Roberto Saviano, Jake Adelstein a fait de ses enquêtes sur le crime organisé des yakuzas au Japon un modèle d’écriture obstinée et d’élucidation de secrets, qui le rapproche d’un vrai travail de détective. Tintin et Dupont ne feraient qu’un s’il était un personnage de Hergé. Jouant sur la confusion de ces deux pratiques, l’auteur a imposé sa voix dans le paysage mondial de l’investigation journalistique sur le crime organisé, avec son premier livre, traduit en France en 2007, Tokyo Vice. Un classique d’un genre littéraire en voie d’expansion.
Publié trois ans à peine après la publication en Italie de l’enquête de Roberto Saviano, Gomorra, sur la mafia napolitaine, le livre de Jake Adelstein dévoile la manière dont les yakuzas contrôlent une grande partie de la vie économique et politique nippone. Une dérive japonaise tout aussi grave que la violence italienne. Autre lieu, même vertige ; autre culture, même conception du crime comme mode opératoire d’un pouvoir opaque. Adapté depuis en série télé, comme Gomorra, Tokyo Vice l’a propulsé dans la famille de ces journalistes-écrivains chez qui l’enquête de chaque instant répond à la quête d’une vie.
Un système de corruption global
Arrivé au Japon en 1988, à l’âge de 19 ans, pour étudier la littérature comparée, le jeune Jake s’initie au journalisme, jusqu’à intégrer le service police-justice du plus grand quotidien japonais, le Yomiuri Shinbun, en 1993, qui lui propose vite de suivre l’activité de la police de Tokyo, sa position d’étranger pouvant lui ouvrir des portes généralement fermées aux journalistes locaux. Puis, pigiste pour Vice News et The Daily Beast, il infiltre les circuits de blanchiment d’argent des yakuzas, rencontre Tadamasa Gotō, fondateur de la plus grosse organisation criminelle japonaise, le Yamaguchi-gumi.
Il aurait pu ne pas s’en relever, mais à force de travail et de chance, peut-être, il est resté vivant
Alors qu’aucun éditeur japonais ne prend le risque de publier ses enquêtes, Adelstein s’obstine à approfondir ses liens, pour mettre en lumière un système de corruption global. En dépit des menaces, le journaliste n’a jamais cédé, se définissant lui-même comme un vrai “obstiné”. Une qualité minimale requise lorsqu’on s’attaque à de tels réseaux d’escrocs et de criminels, chez qui les codes d’honneur ont bon dos lorsqu’il s’agit de sacrifier sans gêne celles et ceux qui voudraient mettre leurs méfaits en plein jour.
Jake Adelstein s’est fondu dans la nuit sombre au pays du Soleil levant. Il aurait pu ne pas s’en relever, mais à force de travail et de chance, peut-être, il est resté vivant, toujours curieux de comprendre un monde interdit aux regards extérieurs. De Tokyo Vice à Tokyo Detective, en passant par Le Dernier des yakuzas et J’ai vendu mon âme en bitcoins, publié chez Points, ses enquêtes acharnées ont ce goût particulier d’une nécessité intérieure : s’attaquer tout seul aux travers d’un pays adoré, en restant convaincu que le journalisme, contrairement à l’hypocrisie, reste un hommage de la vertu au vice.
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