Songwriter encore plus nécessaire en période de crise,
Springsteen sort un album important, indigné. Critique.
Depuis 2008, la crise fait rage et Bruce Springsteen est en colère. Le fils d’ouvriers qu’il reste malgré la gloire et les dollars en a pondu ses textes les plus virulents depuis Nebraska, mais aussi les plus bibliquement résilients depuis The Rising. Dans la première partie du film défilent des couples en quête “d’argent facile”, des ouvriers qui ont tout perdu et rêvent “de dézinguer les salauds”, des “banquiers qui engraissent” et des “ouvriers qui se serrent la ceinture”.
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Cet état des lieux imagé et fumant d’un rêve américain volé par les 1 % du sommet, ces paroles qui pourraient incendier une soirée Occupy Wall Street sont portés par une musique qui puise loin dans les racines américaines tout en accueillant les dernières trouvailles soniques et technologiques : gigues irlandaises, esprit Seeger Sessions secouées par des déhanchements hip-hop et des loops électroniques. C’est The Band scratché par RZA. Après la rage viennent le rebond, l’espoir, la quête de rédemption. Le gospel et les images bibliques s’insinuent.
Le déjà connu Land of Hope and Dreams, habillé ici de nouveaux arrangements modernistes, prolonge l’appel humaniste et baptiste du People Get Ready de Curtis Mayfield. Sur un air de folk celtique et un texte qui revisite politiquement le Thriller de Michael Jackson, We Are Alive en appelle, avec un ton à la Woody Guthrie, à l’esprit toujours vivant des victimes de la violence américaine à travers l’histoire, qu’elles soient grévistes, Noirs en lutte pour les droits civiques ou immigrants clandestinos.
Les larmes ne sont pas loin (l’ADN multi-ethnique de l’Amérique est aussi au coeur d’American Land, chanson digne de Pogues en furie et incluse sur la version Deluxe). Le mix roots-techno du nouveau producteur Ron Aniello est parfois heurté, certaines chansons sont moins inspirées que d’autres (Rocky Ground, dont l’idée gospel-electro est plus séduisante que sa concrétisation) et le batteur se prend pour un champion olympique. Mais à ces réserves près, on tient là un Springsteen important, la voix d’une icône populaire qui réveille, réchauffe et rassemble en ces temps troublés. Wrecking Ball est son Indignez-vous !
Concerts : le 19 juin à Montpellier, les 4 et 5 juillet à Paris (Bercy)
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