Adaptée du roman de Fabrice Humbert sorti en 2020, la minisérie d’Erwan Le Duc constitue l’un des temps forts d’une compétition française très attendue.
Les séries françaises vont globalement bien, surtout dans leur versant “auteuriste” et personnel, que des réussites récentes comme Tout va bien de Camille de Castelnau, Polar Park de Gérald Hustache-Mathieu (présentée à Séries Mania 2023), ou encore Sambre de Jean-Xavier de Lestrade ont porté à haut niveau.
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Ce printemps, La Fièvre (du créateur de Baron noir, Éric Benzekri), à voir sur Canal+ le 18 mars, poursuit cette belle envolée. De quoi attendre de pied ferme la compétition française de Séries Mania, qui présente six créations issues, diplomatie oblige, de plusieurs “familles” du PAF.
Parmi les séries sélectionnées, on verra notamment Homejacking (OCS), huis-clos réalisé par l’expérimenté Hervé Hadmar (Pigalle, la nuit), l’excentrique Murder Club (M6), thriller revisité avec Éric Cantona, Tiphaine Daviot et même Arielle Dombasle, ou encore Ourika (Prime Video), située en banlieue parisienne en 2005, cocréée par Booba et ce qui constitue déjà l’une des très bonnes surprises de l’année.
Excellent Niels Schneider
Le monde n’existe pas arrive quelques mois seulement après la sortie de La Fille de son père, le très beau deuxième long métrage d’Erwan Le Duc, qui faisait suite à Perdrix (2019). À la rentrée, le quadragénaire hyperactif a aussi réalisé Sous contrôle pour Arte, bonne comédie satirique sur la politique avec Léa Drucker. Sa série semble toutefois plus intimement liée à sa filmographie de cinéaste, tant la précision des effets de mise en scène et la singularité du récit emportent tout.
On y suit un journaliste déjà éprouvé par la vie (excellent Niels Schneider, tout en tension rentrée) qui retourne pour la première fois dans la ville de son enfance après que son idole d’alors – et plus si affinités – est accusé du viol et du meurtre d’une jeune femme. Il n’y croit pas et va suivre l’affaire pour le journal parisien dont il est employé. Erwan Le Duc a lui-même travaillé au Monde pendant une décennie.
Des États-Unis au Pas-de-Calais
Au fil de l’enquête plus existentielle que strictement factuelle – ce qui fait un bien fou par les temps fictionnels qui courent, bien trop attachés au polar –, le créateur choisit un ton à la fois très dur et d’une légèreté impeccable. Sa mise en scène “ligne claire” (référence à Hergé, dont les dessins ont été associés à une esthétique épurée) est ponctuée par de petites incises à la fois familières et étranges, qu’on pourrait dire lynchiennes. Elle touche autant au burlesque qu’à des sujets profonds et graves, comme si la vie des protagonistes se jouait dans cette indécision.
Le monde n’existe pas parvient à rester attaché à une géographie, celle de son tournage dans le Pas-de-Calais, mais aussi à une idée plus métaphorique du vivre-ensemble français, fait de non-dits et de mensonges, qu’incarnent les nombreux espaces vides ou désolés arpentés dans la série. Dans le roman original, l’action se déroulait aux États-Unis. L’exemple d’une relocalisation réussie, qui reste longtemps en tête.
Le monde n’existe pas, d’Erwan Le Duc, avec Niels Schneider, Maud Wyler, Julien Gaspar-Oliveri, Nicolas Chupin. En compétition française.
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