Le couple madrilène Javier Ambrossi et Javier Calvo, adulé dans son pays, présente pour la première fois l’une de ses créations au festival Séries Mania. “La Mesías” est un drame familial barré à découvrir dans la section Panorama.
Il n’y a pas que La Casa de Papel dans la vie. L’Espagne a profité du succès fou de la série Netflix apparue en 2017, mais il semblerait que la hype internationale – en dehors de l’Angleterre et des États-Unis – soit aujourd’hui repartie plus vers l’est, notamment du côté des séries coréennes qui attirent tous les regards. D’un certain point de vue, il s’agit d’une bonne nouvelle pour notre voisin européen qui se fait désormais connaître pour d’autres aventures un peu plus risquées, moins soumises aux contraintes de genre et de rythme souvent associées aux cartons mondiaux.
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Si elle a connu des audiences hors du commun lors de sa diffusion sur la chaîne Movistar Plus+, La Mesías arrive à Séries Mania dans la section Panorama avec une étiquette arty, liée aux personnalités de ses créateurs trentenaires, Javier Ambrossi et Javier Calvo. Dans leur pays, on les appelle “Los Javis” tant le couple qu’ils forment a traversé la pop culture depuis quelques années.
Acteurs tous les deux, ils écrivent et réalisent ensemble depuis une décennie et ont façonné la comédie musicale La llamada, adaptée ensuite au cinéma. Leur statut en Espagne est tel qu’ils ont participé à l’hommage à Tout sur ma mère d’Almodóvar lors des derniers Goya (l’équivalent des César), revendiquant la filiation avec le génie madrilène.
Nés dans les années 1980 et 1990, “Los Javis” ne sont pas issus de la Movida, mouvement artistique de l’Espagne post-franquiste auquel a appartenu le réalisateur d’Attache-moi !, mais ils en poursuivent l’ambition baroque et non-conformiste. Leur précédente et très bonne série Veneno racontait la vie agitée de l’icône trans Cristina Ortiz Rodríguez, soulignant, des années 1960 à l’époque contemporaine, l’existence d’une autre histoire espagnole loin des standards hétéro-patriarcaux.
Kitsch et féroce
Avec La Mesías, ils s’attaquent à un tout autre sujet, même si leur style féroce et proche des corps reste le même. La série montre comment deux frère et sœur reviennent sur leur enfance traumatique à la faveur d’une chanson kitsch qui cartonne sur Internet. Un peu bizarre ? C’est assumé.
Elle fonctionne sur de multiples allers-retours entre les années 1980, 1990 et 2010, racontant la quête d’un technicien de cinéma, Enric, pour panser quelques plaies d’une enfance passée avec ses sœurs – dont Irene, qu’il recontacte – auprès d’une mère qui n’a pas réussi à leur offrir une vie stable, ni même le moindre sentiment de sécurité. La série se démarque en premier lieu par son portrait atypique d’une mère à côté de la plaque, souvent maltraitante mais aussi constamment brutalisée par les hommes – et finalement embrigadée dans une secte. Une forme de tragédie familiale acérée.
Sur les sept épisodes que compte la série, Séries Mania en présente deux (le mardi 19 mars). De quoi se faire une idée de son intensité, sans pour autant en comprendre tous les enjeux que les créateurs distillent avec habileté, s’arrêtant autant sur les psychés tordues de leurs personnages que sur les atmosphères, les couleurs, les peaux. Déstabilisante par moments et souvent prenante, voici une vraie série de festival, qui donne envie de voir la suite très vite.
La Mesías, de Javier Ambrossi et Javier Calvo, avec Roger Casamajor, Macarena García, Ana Rujas. En projection à Séries Mania le mardi 19 mars.
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