Vécue comme une grande victoire féministe, l’inscription de l’IVG dans la Constitution mérite tout de fois quelques nuances. S’agit-il d’une vraie décision progressiste ou d’un geste symbolique ?
Ce mercredi 28 février, le Sénat mettait un terme à de longs mois de débats en adoptant à la majorité l’inscription de l’IVG dans la Constitution. Pour beaucoup, cette décision représentait une grand pas pour les droits des femmes. Cependant, est-ce vraiment une si grande victoire ?
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Marquée par un chemin jalonné d’embûches et d’obstacles, cette proposition de loi constitutionnelle a connu quelques modifications. D’abord portée par LFI, elle visait à garantir “l’effectivité et l’égal accès au droit à l’IVG” tandis que le Sénat préférait adopter une version modifiée qui faisait mention de la “liberté de la femme de mettre fin à sa grossesse”. Face à cette opposition, le gouvernement a tranché et opté pour la notion de “liberté garantie”, qui met de côté celle de “droit”.
Un changement en apparence anodin mais pas sans conséquences, comme nous l’explique la TikTokeuse Géomancis Média, vulgarisatrice juridique, dans sa dernière vidéo : “Contrairement au droit, la liberté n’engage pas l’État à te donner les moyens pour la réaliser. […] Pour garantir l’exercice de cette liberté, il va te falloir du droit, c’est à dire la loi.”
Concrètement, qu’est ce que cela veut dire ? “Si on jour tu te retrouves dans une situation où un gouvernement est contre l’IVG, il ne va mettre en place aucun droit, aucune loi, pour te permettre, dans la réalité pratique, d’y avoirs recours (en gros : tu te débrouilles)”, résume t-elle avant de conclure que cette nuance s’apparente davantage à “une liberté sans le droit”.
Un texte purement symbolique ?
Elle n’est pas la seule à avoir relever cette distinction. Annie Ernaux, lors de la soirée de lancement du nouveau numéro de la revue féministe La Déferlante, s’est ainsi laissée aller à un lapsus : “Moi, en 1964, je cherchais partout quelqu’un qui veuille bien me mettre une sonde dans le ventre pour avorter ! Maintenant, dans la Constitution, l’IVG est un droit… euh non ce n’est pas un droit…c’est une liberté garantie !”, déclame t-elle devant une salle hilare, avant d’expliquer qu’elle aussi “aurait préféré que ce soit le droit”.
Sur France Bleu, Laureline Fontaine, professeure de droit constitutionnel à la Sorbonne nouvelle Paris 3, ajoute que ce texte “signifie qu’aucune loi ne pourra dire explicitement que la femme n’a pas la liberté de recourir à l’IVG” mais qu’il ne ”dit rien sur les conditions dans lesquelles cette liberté s’exerce. C’est à la loi de le dire”.
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