Diffusée depuis début janvier sur Netflix, “Les Frères Sun” se révèle être un cocktail plutôt réussi d’arts martiaux et d’intrigues familiales. Le tout porté par une matriarche jouée par Michelle Yeoh…
Un an et demi après avoir incarné une mère de famille sino-américaine usée par la vie, qu’une dislocation de la réalité aspirait dans les dédales d’un vertigineux multivers (Everything Everywhere All At Once), Michelle Yeoh rempile en matriarche bicéphale. En apparence : femme respectable et rompue à une existence pavillonnaire sans remous dans la banlieue de Los Angeles. En secret : cheffe de clan inflexible d’une organisation mafieuse taïwanese prise dans une guerre des Triades tentaculaire sur deux continents.
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Les deux facettes, a priori incompatibles, de la personnalité d’Eileen “Mama” Sun, sont incarnées par ses deux fils que tout semble opposer. D’un côté Charles (Justin Chien), l’aîné, héritier légitime du clan et maître en arts martiaux, menant à Taipei la vie fastueuse d’un prince de la pègre ; de l’autre Bruce (Sam Song Li), le cadet autrement plus tendre, vivant avec sa mère à LA, et ignorant tout de son lignage criminel. Mais lorsque le patriarche de la famille échappe de peu à la mort suite à une tentative d’assassinat commanditée par une mystérieuse organisation, Charles doit quitter Taiwan pour se rendre en Californie, et veiller aux affaires familiales. L’occasion d’une première rencontre, forcément explosive, avec son petit frère Bruce, couvé par sa mère et pas vraiment outillé pour la castagne.
Hybridation des genres
Comédie d’arts martiaux pilotée par le débutant Byron Wu et le confirmé Brad Falchuk (compère de Ryan Murphy et co-créateur de Glee et American Horror Story notamment), Les Frères Sun réemploie à sa sauce (pop et californienne) les codes du film de gangster et d’arts martiaux taïwanais et hongkongais, pour les hybrider à une comédie netflixienne de plutôt bonne facture. La série alterne bastons dosées en mandales cosmiques (c’est assez violent), bromance efficacement brodée (c’est plutôt touchant), et scènes comiques subtilement ouvragées (c’est parfois marrant).
L’opposition entre Charles, gangster taiseux et inflexible, biberonné au kung-fu et aux conspirations claniques, et son frangin Bruce, rompu au mode de vie californien, se rêvant comédien de stand-up et détournant l’argent que sa mère alloue à ses études de médecine pour suivre des cours d’impro, constitue sans surprise le sel du show, qui parvient avec métier à infléchir les trajectoires de ses héros dépareillés. Le premier devra nécessairement s’attendrir au contact du second, et le second s’endurcir au contact du premier, occasionnant des scènes de comédie qui font souvent mouche, notamment au gré de chorégraphies d’arts martiaux (rondement menées) que viennent twister d’habiles trouvailles comiques, comme cette baston à une fête d’anniversaire, où les assassins sont engoncés dans de ridicules costumes de dinosaures.
On pourra reprocher à la série un scénario qui gagne en enjeux (parfois artificiellement gonflés) ce qu’il perd en vraisemblance, et quelques errements narratifs dès lors que l’on s’écarte de la relation entre les frères Sun et leur mère (Michelle Yeoh donc, impeccable en mère de famille aimante / cheffe de guerre impavide). Les Frères Sun nous emporte malgré tout, et propose, en outre, une incursion réjouissante dans la communauté asio-américaine, qui n’échappe pas à quelques poncifs, mais assume sans détour sa fibre parodique.
Les Frères Sun de Brad Falchuk et Byron Wu avec Michelle Yeoh, Justin Chien – Actuellement sur Netflix
Les Frères Sun, avec Michelle Yeoh, Justin Chien, Sam Song Li, sur Netflix
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