Quels livres la rédaction des Inrockuptibles mettra sous le sapin cette année ? Chaque jour jusqu’au 24 décembre, un·e journaliste partagera son choix. Aujourd’hui, Fabienne Arvers, responsable de la rubrique théâtre, a choisi “Nous étions les Mulvaney” de Joyce Carol Oates.
De Joyce Carol Oates, je lis tout ce qui me tombe sous la main. Ça tombe bien, on m’a récemment offert une dizaine de ses romans que je ne connaissais pas encore. D’elle, j’aime sa façon de décortiquer les liens familiaux jusqu’au point où ils se transforment en nœuds coulants et font de la vie un enfer. De suivre la logique interne d’un personnage malgré l’incompréhension que son attitude provoque, sans jamais le juger.
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Conte et cauchemar
Nous étions les Mulvaney commence comme un conte de fées. On y suit avec délices la vie bohême de la famille Mulvaney, parents, enfants et animaux réunis, perchée au sommet d’une colline. Jusqu’au drame de la Saint-Valentin 1976 lorsque Marianne, l’adolescente de la famille, rentre d’une soirée arrosée sensiblement différente. Amochée. Mais personne n’osera nommer clairement la violence sexuelle dont elle a été l’objet. Ni elle, ni ses parents, ni ses frères. Et tous·tes seront amoché·es à leur tour par les répercussions du drame dans leur intimité.
L’explosion en vol de l’harmonie familiale est décrite tour à tour par chacun·e des protagonistes et l’on suit leur parcours sur plusieurs décennies. Chacun·e blessé·e au-delà de toute mesure et pourtant, incapable de porter sur les faits une parole apte à reconnaître et l’acte et la souffrance qu’elle engendre. Un roman choral où chaque voix fait entendre une tonalité différente qui rend justice à la complexité de la vie et au nuancier infini des émotions et des sentiments. Jusqu’à l’improbable happy end, véritable coup de théâtre romanesque dont Joyce Carol Oates a le secret…
Nous étions les Mulvaney de Joyce Carol Oates (Le Livre de poche) 699 p, 8,90 €.
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