Une superbe copie restaurée de l’un des plus grands classiques indiens de l’histoire du cinéma, qui est également rééditée en Blu-ray.
La “trilogie d’Apu”, c’est La Complainte du sentier (très connu aussi sous le titre de Pather Panchali, 1955), L’Invaincu (1956), et Le Monde d’Apu (1959), trois films qui racontent la naissance, l’enfance, l’adolescence, le mariage, les études, le passage à l’âge adulte et à la paternité d’Apu, né dans une famille pauvre – son père était prêtre hindouiste –, au cours des années 1920.
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La trilogie est l’adaptation de deux romans du grand écrivain bengali Bibhutibhushan Bandopadhyay (1894-1950) et marque l’entrée fracassante dans la réalisation d’un inconnu, Satyajit Ray (1921-1992), trentenaire cinéphile issu d’une famille de lettrés (écrivains, imprimeurs, éditeurs, etc.) du Bengale, en Inde.
Graphiste, illustrateur et directeur artistique de son état, il entre un peu par hasard à la Calcutta Film Society. C’est à ce titre qu’il fait la connaissance de Jean Renoir quand celui-ci, après son expérience hollywoodienne, vient tourner Le Fleuve (autre chef-d’œuvre), en Inde, en 1949. Satyajit Ray lui apporte son aide pour le casting du film et les repérages.
Collaborateur et admirateur de Jean Renoir
Lors d’un séjour en Europe, Ray découvre deux films qui vont le marquer : La Règle du jeu de Renoir (dont il ne connaissait pas du tout l’œuvre française) et Le Voleur de bicyclette de Vittorio De Sica, l’un des parangons du néoréalisme italien.
Il s’aperçoit alors qu’il est possible de tourner des films “autrement”, en décors naturels, et entreprend, en 1950, avec un producteur mais aussi de l’argent familial, de financer et de réaliser son premier film, La Complainte du sentier (premier volet de la trilogie d’Apu), avec des bouts de ficelle, à l’arrache, avec de l’ingéniosité, plusieurs interruptions de tournage et un grand sens de l’économie (un story-board, peu de prises – personne ou presque n’est payé).
Une façon de filmer tout en douceur, à l’affût des sentiments des personnages, avec une réelle bienveillance
L’aventure dure cinq ans et accouche d’un film sublime. Le monde entier va aussi découvrir qu’il existe en Inde un cinéma différent de celui, de grande consommation, qu’est celui de Bollywood. Mais il faudra plusieurs années pour que les cinéphiles du monde entier découvrent la trilogie dans sa totalité.
La beauté de la trilogie tient à la magnifique façon de filmer de Ray, tout en douceur, à l’affût des sentiments des personnages, avec une réelle bienveillance et une profondeur de champ très renoirienne, où hommes et nature ne font qu’un, mais où la mort peut s’abattre d’un moment à l’autre.
Des dons de composition du cadre très impressionnants
Sa caméra semble glisser pour filmer les paysages. La jungle bruisse, les pans de mur servent de rideaux de théâtre. Les visages, en gros plan, expriment des sentiments intenses, parfois énigmatiques.
Avant même Charulata, l’un de ses plus beaux films, si chorégraphié, si construit, où chaque image est un signe, Satyajit Ray manifeste des dons de composition du cadre très impressionnants. Cette trilogie est aujourd’hui un grand classique de l’histoire du cinéma.
La trilogie ressort en salle le 6 décembre dans une restauration 4K sublime. Ainsi qu’en Blu-ray également 4K chez Carlotta dans une belle édition (environ 50 €), comprenant notamment un livret inédit de l’un des grands spécialistes de Satyajit Ray, le critique et historien du cinéma Charles Tesson.
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