Une plongée passionnante et politique dans l’enfer quotidien d’un palais de justice.
Après À la folie (Flammarion, 2021), texte de non-fiction qui se lisait comme un roman, Joy Sorman signe une fiction qui se révèle passionnante par son aspect documentaire. Soit un homme, Bart, qui choisit de s’exiler dans le Palais de Justice de Paris pour ne plus en sortir et assister à toutes les audiences.
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Sorman poursuit ici son exploration de nos fractures nationales, en immersion dans un lieu que la société évite souvent de regarder (un hôpital psychiatrique, une gare ou des immeubles insalubres). Comme toujours, elle sait révéler cette humanité dont elle fait son matériau, dévoiler la détresse, résumer la problématique d’une vie.
Une machine qui broie l’humain
Dans ce défilé de cas judiciaires saisis sur le vif où victimes, accusé·es, avocat·es et juges prennent la parole à tour de rôle, Sorman signe un texte radicalement politique. Elle décrit le petit peuple d’aujourd’hui, les conflits de classe à l’œuvre dans la mécanique implacable d’un tribunal, l’arrogance des un·es et l’égarement des autres.
De salle d’audience en salle d’audience, Bart assiste à un ballet qui semble sans fin et Sorman dénonce le recours systématique à l’emprisonnement, la banalité de sanctions décidées en quelques minutes alors qu’elles peuvent détruire une existence, l’abattage des comparutions immédiates, les magistrat·es qui “jugent une classe à laquelle aucun d’eux n’appartiendra jamais”. Jusqu’au très beau chapitre final, qui donne tout son sens au procédé littéraire de la romancière.
Le Témoin de Joy Sorman (Flammarion), 288 pages, 20 €. En librairie le 10 janvier.
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