Avec leurs clips similaires, les Rolling Stones et Justice signent deux odes à l’émancipation des femmes.
Répétition
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A vingt-quatre heures d’intervalle, deux poids lourds de l’industrie musicale ont lâché un clip semblable. D’un côté, Susan Sarandon qui s’éclate au volant de sa bagnole. De l’autre, Kristen Stewart qui s’éclate au volant de sa bagnole.
La première a répondu à l’invitation de Justice, qui choisit d’apparaître à ses côtés. La seconde a répondu à l’invitation des Rolling Stones, qui ont choisi de ne pas apparaître à ses côtés. A quelques filtres près, les images sont les mêmes (la voiture, la danse lascive, les lunettes de soleil), le décor aussi (l’Ouest américain, désertique pour les uns, angeleno pour les autres).
Le réalisateur n’est pourtant pas le même : François Rousselet signe le Ride ‘Em on down des Rolling Stones, Pascal Teixeira le Fire de Justice. Simple coïncidence qui devrait tout au plus nous faire lever un sourcil ? Ou répétition significative d’un même motif dans un monde où l’image tend à supplanter le langage ?
Mythologie et archétype
Voiture + Etats-Unis = liberté. Voici résumé en une équation le sous-texte commun à ces deux clips. Sans voiture, pas de déplacement possible aux Etats-Unis, où la notion de frontière est inscrite dans la mythologie nationale. Synonyme d’initiative personnelle, d’aventure, de découverte, la conquête de l’Ouest s’accompagnait d’un recul de la fameuse frontière, théorisée par Frederick Jackson Turner au XIXe siècle comme symbole de progrès, avant d’être récupérée et transformée en “nouvelle frontière” par Kennedy dans un discours de 1960.
Elle désigne alors autant la conquête spatiale que les inégalités sociales, le racisme que la guerre froide, autant de défis qui attendaient les Américains.
Plus d’un demi-siècle plus tard, la voiture est toujours un archétype de liberté. En témoigne son apparition dans le champ publicitaire, un fameux parfum d’une fameuse marque mettant en scène Johnny Depp renouant avec sa nature sauvage en conduisant dans le désert américain.
Nouvelle frontière
Ici, le conducteur est une conductrice. Détail qui devrait ne plus avoir d’importance mais qui l’a pourtant encore. Surtout lorsqu’il s’agit de Susan Sarandon et que le clip fait référence à Thelma et Louise, grand film féministe de Ridley Scott (1991).
Ride ‘Em on down et Fire sont deux hymnes à l’émancipation des femmes. Kristen Stewart conquiert le terrain, masculin par excellence, de la Los Angeles River, dont le lit asséché et bétonné servit de décor à nombre de scènes de courses-poursuites mythiques, de Grease à Terminator.
Susan Sarandon, elle, est au volant d’une voiture nettoyée par le duo Justice dans un pastiche de la classique scène de lavage sexy (dont le climax fut atteint par Jessica Simpson en bikini dans le clip de These Boots Are Made For Walkin’).
Les rôles sont inversés, la fluidité totale et le message très clair. D’autant que le dernier album de Justice a pour nom Woman et s’envisage donc comme une célébration de “la femme”, thème hautement d’actualité en 2016, année de luttes féministes. La frontière à repousser est donc désormais celle des discriminations liées au genre.
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