Dans ses mémoires récemment publiées, “La Femme en moi”, Britney Spears revient sur les épisodes les plus durs de sa vie, entre la tutelle de son père, les paparazzis intrusifs et ses relations amoureuses destructrices. Au regard de ces révélations, nous nous sommes penchés sur trois de ses albums les plus iconiques pour rendre compte de ce qu’ils nous révélaient sur elle.
In the Zone (2003)
Dans la carrière de Britney, In the Zone a tout d’un moment charnière. Son album éponyme sorti deux ans plus tôt déçoit, et la figure de la jeune étudiante à la fois innocente et ultra-sexualisée, chouchoute de l’Amérique blanche, se fait de plus en plus désuète. Publiquement, elle enchaîne les déclarations moquées (sur le fait qu’elle serait toujours vierge) et les prises de position risquées (son soutien à la peine de mort).
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Dans le privé, la fin de son idylle surmédiatisée avec le golden boy des États-Unis, Justin Timberlake, est encore fraîche. Pire encore : ce dernier sort quelques mois après leur rupture Cry Me A River, hit instantané, où le chanteur pleure une prétendue tromperie dont il aurait été la victime. Dans ses mémoires, Britney raconte à propos de cette époque qu’elle se sentait décrite “comme une traînée qui avait brisé le cœur de la coqueluche des États-Unis”.
Elle se rappelle de la honte qu’elle ressentait lors d’évènements publics, en clubs ou lors de matchs, où la foule la huait à l’unisson. Ce scandale médiatique est l’une des pierres angulaires d’In the Zone, son quatrième album sorti en 2003. Le disque représente pour Britney un projet hybride, entre deux eaux, tiraillée par ce qui faisait son succès d’antan et son envie d’expérimenter. De son featuring avec Madonna, sa mère spirituelle de la pop, au hip-hop des Ying Yang Twins, en passant par la piste ultra-sensuelle Early Mornin’, Britney s’efface et se découvre.
Parmi tous les morceaux pop et survoltés qui parsèment le projet, la ballade désespérée Everytime dissimule d’ores et déjà tout le mal-être qu’elle confie aujourd’hui. Dans un clip réalisé par le photographe David LaChapelle, Britney se met en scène dans son propre rôle, celui d’une star en plein Vegas qui noie (littéralement) sa solitude dans la drogue, acculée par les paparazzis dont l’acharnement atteint la vie de couple. Réponse non-officielle à Cry Me A River dans ses paroles (I may have made it rain / Please forgive me / My weakness caused you pain / And this song is my sorry, écrit-elle en référence à la pluie du clip de Justin) ou encore référence à son avortement forcé par Timberlake dans son clip : à l’aube de La Femme en moi et de ses révélations, Everytime arbore un tout autre visage.
Blackout (2007)
Si In the Zone est un virage dans la carrière de Britney, Blackout marque une césure définitive. Sorti en 2007, ce cinquième album arrive au pire moment de sa vie : entre deux désintox la chanteuse perd la garde de ses enfants et enchaîne les apparitions publiques polémiques. Qu’elle soit au volant de sa voiture avec son bébé sur les genoux, crâne rasé à la surprise générale ou qu’elle se retrouve à dormir sur un parking, Britney continue d’être scrutée et harcelée par les paparazzis. Après avoir succombé à leur acharnement dans le clip d’Everytime, Britney décide de changer les règles, de renverser le rapport, et de déclarer la guerre à ces hommes sans limites qui font de sa vie un enfer.
En témoigne le clip so années 2000 du très pop Piece Of Me, où elle s’adresse directement aux paparazzis et se moque avec une grande intelligence de l’image qu’ils donnent d’elle (I’m Miss Bad Media Karma / Another day, another drama / Guess I can’t see the harm in working and being a mama / And with a kid on my arm, I’m still an exceptional earner / And you want a piece of me) Armée d’un jean troué, d’une fourrure sans manches et de mitaines en cuir, on la voit successivement se déshabiller devant eux avec provocation, leur marcher dessus ou les humilier le sourire aux lèvres.
Fini le fatalisme, place au mépris. Ce petit bout d’impertinence reflète toute l’aura de Blackout, grand album oublié, où la pop star se déprend brièvement de l’image de victime avec une désinvolture jouissive.
Circus (2008)
Circus porte bien son nom, à ceci près que le cirque qui s’était orchestré en 2008 relevait plus de la sombre mascarade que du spectacle guilleret. Si l’album s’ouvre avec le sulfureux Womanizer, c’est pourtant sur une note bien noire que s’initie l’année pour Britney Spears. Début janvier, elle doit céder la garde de ses fils à son ex-mari, Kevin Federline.
Dans la foulée, son médecin convoque les urgences psychiatriques – idée qu’aurait soufflé Sam Lufti, son manager d’alors. La chanteuse est ensuite internée, et ne sera visitée que par ce dernier : elle refuse de voir sa famille, à commencer par son père. Chose qui ne sera pas au goût du principal intéressé. Vraiment pas du tout. Ni une ni deux, il demande la mise sous tutelle. Et l’obtiendra : le vendredi 1er février, Britney Spears perd son indépendance.
Neuf mois plus tard, c’est pourtant un nouvel album qui voit le jour – Circus, donc – plutôt salvateur : il ravive son succès tout comme il vient faire table rase des deux dégradantes années écoulées. À travers ses quinze titres, c’est bien le tournis d’une période d’excès que la pop-star raconte. L’alcool comme subterfuge.
Les soirées agitées, arrosées, scandaleuses – Blur évoque, par exemple, un matin où elle se réveille (aux prises avec le ricochet des verres de la veille) chez un homme qu’elle ne connaît pas. Et parallèlement, elle s’affaire à dénoncer le regard lubrique de la presse people à son égard, cette hyper-sexualisation latente dont elle ne pouvait se défaire. “J’ai toujours été reluquée en grandissant. Tous me disaient ce qu’ils pensaient de mon corps, et ce, depuis mon adolescence […] Quand je repense à l’autorité de mon père et ses associés sur mon corps, mon argent… J’ai passé 13 ans à être l’ombre de moi-même. Je ne méritais pas ce que ma famille m’a fait”, écrit-elle à ce propos dans son livre.
La mainmise de son père sur sa vie ne la rendait pas moins lucide sur le cours des choses. If U Seek Amy en est l’habile reflet, entre ruse sémantique et ironie caustique. Le titre raconte la recherche d’une certaine Amy, lors d’une escapade en boîte de nuit. Et son nom homophone, dont les syllabes forment le sous-texte “F.U.C.K me”, a suscité son lot de réactions et controverses lors de sa sortie (avant de se hisser dans le top 20 aux États-Unis, tout de même).
Avec une intelligence certaine, elle y tourne en dérision la dualité entre la vierge et la putain : le clip la montre dans une soirée luxurieuse, se livrant à des danses lascives, avant de s’en extirper, tirée à quatre épingle. Gilet rose posé délicatement aux épaules, brushing impeccable au bras d’un homme du même acabit, on la voit répondre aux paparazzis qui l’assaillent dans une sorte de jeu de rôle incisif. L’album Circus a ainsi des allures de mise au point, montrant une Britney Spears à mille lieues d’être dupe, armée de son électro-pop délivrée au lance-flammes.
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