Un navet signé Albert Dupontel, un film caricatural de Ken Loach et la ressortie d’une merveille japonaise… Voici les films à voir (ou pas) cette semaine.
Second Tour, d’Albert Dupontel
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Dupontel ne conçoit le film que par addition d’éléments, chargeant son personnage d’un kouglof de secrets et de scandales : jumeau, ascendances secrètes, complices semi-soviétiques… La forme n’est pas plus digeste : intégralement étalonné en orange, le film pique les yeux, a fortiori quand il s’embarque dans des plans invraisemblables de technicité inutile.
The Old Oak, de Ken Loach
Le regard de The Old Oak évite la complexité et ramène tout sur le tableau de la psychologie pour expliquer les agissements ou affects qui traversent ses personnages, quand ce n’est pas la simple considération morale qui vient les condamner. Le film n’est ainsi jamais concerné par les contradictions internes qui s’opèrent chez un travailleur (corps social qui, à part son personnage principal, ne sera jamais filmé au travail), mais consacre la majorité de son temps à filmer des êtres vertueux, à la limite de l’angélisme, bientôt mis à rude épreuve par des circonstances extérieures.
Déménagement, de Shinji Sōmai
Véritable révélation, Déménagement, à la fois cruel et mystérieux, s’inscrit, sans forcer, dans la cohorte des grands films d’enfance. Un peu à la manière d’Ōshima dans Le Petit Garçon, Sōmai filme magnifiquement l’opacité de l’enfance, tout en nous projetant de plain-pied dans l’intimité psychique d’une petite fille, superbement incarnée par Tomoko Tabata, qui poursuivra d’ailleurs sa carrière à l’âge d’adulte. Après avoir vibré avec Déménagement, on brûle de découvrir les autres films du Japonais dans les salles françaises. Ce n’est pas un souhait, c’est un impératif.
Le Vourdalak, d’Adrien Beau
S’il fait référence au Nosferatu de Murnau et qu’on pense pour notre part à La Belle dormant d’Arrieta ou au cinéma de Tim Burton, Le Vourdalak invente son propre territoire de cinéma, né d’un double mouvement inverse. D’un côté un retour aux sources d’un cinéma organique et artisanal (jeux d’ombres expressionnistes, usage d’une marionnette pour représenter le monstre, pellicule 16mm) et du mythe vampirique (la nouvelle est antérieure au classique de Bram Stoker, Dracula) et, de l’autre, une projection dans des thématiques contemporaines (la fluidité de genre et la satire du patriarcat).
La critique de Bruno Deruisseau
Sissi & moi, de Frauke Finsterwalder
Sissi & moi est un film sur l’amitié. Et “entre deux amis, il n’y en a qu’un qui soit l’ami de l’autre”, disait l’écrivain Alphonse Karr. Vision sans doute pessimiste, mais pour Finsterwalder, le propos est politique : dans une société monarchique, où les classes sont très déterminées et rigides, il ne peut exister de véritable amitié entre des personnes qui ne seront jamais du même monde.
La critique de Jean-Baptiste Morain
Le Syndrome des amours passées, d’Ann Sirot et Raphaël Balboni
Après le plutôt réussi Une vie démente (2021), Ann Sirot et Raphaël Balboni resservent une même mise en scène faite d’improvisations, de jump cut et d’un esprit de sitcom un peu zinzin. Le souci est que le film est tiraillé entre un anticonformisme de façade et des réflexes normatifs un peu poussiéreux. Malgré la belle énergie de Lucie Debay (déjà vue cette année dans Lucie perd son cheval), Le Syndrome des amours passées manque de grâce. Son principe d’archéologie d’un couple finit par dérouler un système trop redondant et trop sage.
La critique de Bruno Deruisseau
Chambre 999, de Lubna Playoust
Que se passe-t-il lorsqu’on enferme un·e cinéaste et une caméra après lui avoir demandé si le cinéma était un langage en voie de disparition ? Quarante ans après que Wim Wenders a eu cette merveilleuse idée, Lubna Playoust l’a reprise et proposée à une trentaine de réalisateur·rices, parmi lesquels Rebecca Zlotowski, David Cronenberg, Monia Chokri, Baz Luhrmann… La tentation du name dropping est bien grande, tant l’intérêt du documentaire semble résider dans son casting.
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