Dans un entretien croisé passionnant donné à “Interview”, les deux cinéastes discutent de leurs prochains films, de l’époque actuelle, des années 1990 ou encore de la jeunesse. On revient sur les points marquants de leur échange.
Gregg Araki est né en 1959, Richard Linklater en 1960. Alors que leurs films respectifs sont devenus des emblèmes de la jeunesse des années 90 tout en marquant un renouveau du cinéma indépendant américain, le magazine Interview a eu la bonne idée de réunir les deux cinéastes le temps d’un entretien croisé publié le 10 octobre.
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L’occasion pour les deux réalisateurs, plus de trente ans après leurs débuts, de s’interroger sur l’état du cinéma et de son industrie mais aussi de prendre du recul sur leur génération pour la mettre en perspective avec le monde actuel.
Leurs prochains projets respectifs
Cette longue discussion nous permet d’abord d’en savoir un peu plus sur les projets des deux réalisateurs. Après avoir réalisé plusieurs épisodes de séries (13 Reasons Why, Dahmer) et créé la sienne en 2019 (Now Apocalypse), Gregg Araki affirme dans cet entretien “travailler sur un nouveau film”, près de dix ans après son dernier long-métrage (le beau White Bird en 2014). Bien que différent de The Doom Generation (1995) et Nowhere (1997), ce projet devrait être “taillé dans la même étoffe” que ces deux films.
Richard Linklater, quant à lui, confie qu’il planche toujours sur différents projets. Pour l’un d’entre eux, le cinéaste devrait retrouver son collaborateur régulier, Ethan Hawke (Boyhood, la trilogie Before, Fast Food Nation…). Il se confie également au sujet d’un film “très Nouvelle Vague” qu’il espère tourner à Paris avec une équipe et des acteurs français.
Nowhere et The Doom Generation vus d’aujourd’hui
De Netflix à la disparition des CDs et DVDs en passant par la critique de cinéma qui verse dans le “clickbait” aux États-Unis, les deux cinéastes en profitent pour s’interroger sur le monde contemporain et l’état du cinéma au regard de leurs propres expériences dans les années 1990.
Araki s’interroge notamment sur l’importance générationnelle de Nowhere et The Doom Generation, les deux films ayant récemment été restaurés en version 4K : “Les jeunes sont venus en masse. Je demande toujours combien de personnes dans ce public n’ont encore jamais vu le film et c’est toujours au moins la moitié. Je trouve ça fou, la manière dont ces jeunes et ce nouveau public découvrent le film. C’est l’une des choses qui m’enthousiasme le plus : ces deux films ont vécu pendant des décénnies avec une foule de fans. Mais ils ont vu les versions les plus merdiques et les plus minables de ces films, ce qui me donne littéralement la chair de poule.”
Linklater en profite alors pour rebondir et souligner qu’Araki a réussi à conquérir une nouvelle génération : “Mais le plus excitant, c’est qu’il y a toute une nouvelle génération qui n’était même pas née quand ils sont sortis et qui pourtant adorent les deux films. L’un de mes enfants de 19 ans a un putain de tatouage Nowhere sur son mollet. Tu corromps une autre génération, il faut que tu le saches.”
Araki compare également ses films à l’objet générationnel de la jeunesse actuelle : la série HBO Euphoria. Si ses propres longs métrages saisissaient le désespoir et la souffrance de la jeunesse, le cinéaste souligne qu’ils charriaient également de la joie, contrairement à la série de Sam Levinson : “L’une des choses qui rend Nowhere et Doom spéciaux, c’est qu’il y a cette angoisse, cette colère, cette putain de confusion qu’il y a à être jeune et tout ça. Mais grâce à l’influence du punk rock et de la musique new wave, il y a aussi de l’amusement et de la joie. Ça reste un moment amusant, contrairement à Euphoria qui propose du sexe, des drogues, du nihilisme et tout ça, mais c’est misérable. Il n’y a pas de joie.”
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