Imaginé par Hubert Colas, l’espace Montévidéo de Marseille, est menacé de disparaître suite à la mise en vente du bâtiment. Une situation en urgence absolue.
Longtemps, Hubert Colas s’est tu, mettant toute son énergie à tenter de convaincre les tutelles de l’urgence à trouver une solution à l’expulsion annoncée de Montevidéo fin mai. En vain. Quelle délicate attention de l’avoir prévenu de faire ses cartons en plein milieu du festival Actoral, de manière à être prêt, au lendemain de l’ultime soirée de spectacles le 14 octobre, à dégager au plus vite, sans autre lieu d’accueil… Alors, à huit jours de la fin du festival Actoral, le 5 octobre, Hubert Colas s’est décidé à organiser une conférence de presse dans les murs de Montévidéo : “La Préfecture nous a fait savoir que nous sommes expulsables le 15 octobre. Nous lançons un SOS pour que l’ensemble de nos tutelles, Ville, État, Région et Département trouvent une solution de relocalisation.”
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
On nous explique patiemment que la justice a tranché en faveur du propriétaire des lieux qui souhaite revendre le bâtiment pour faire construire un immeuble, tellement plus rentable. Que le procès lancé par Hubert Colas pour défendre cet espace de création, de travail et de résidence d’artistes a duré trois ans : “On a fait un procès qui est allé en appel et notre pourvoi en cassation a été rejeté. C’est un rebondissement non stop qui a pris fin le 15 avril”, nous expliquait-il fin mai. Mais comment la justice peut-elle trancher en faveur des promoteurs alors même “qu’en France, toute demande de réaffectation d’un théâtre doit être assujettie à la volonté du ministère de la Culture sous l’ordonnance de 1945 et, effectivement, le ministère de la Culture a confirmé que Montevidéo devait rester un théâtre, étant protégé par cette ordonnance” ?
Situation d’urgence
Aujourd’hui, on est en droit de poser la question à ces tutelles et à madame la ministre de la Culture : de quelle justice s’agit-il lorsque le droit, protégé par une ordonnance du ministère de la Culture, s’avère impuissant à se faire respecter ? Rappelons l’article 2 de cette ordonnance n° 45-23 39 du 13 octobre 1945, modifié par la loi n°99-198 du 18 mars 1999 : “Aucune salle de spectacles publics spécialement aménagée de façon permanente pour y donner des concerts, des spectacles de variétés ou des représentations d’art dramatique, lyrique ou chorégraphique ne peut recevoir une autre affectation ni être démolie sans que le propriétaire ou l’usager ait obtenu l’autorisation du ministre chargé de la culture. En cas d’infraction aux prescriptions du paragraphe ci-dessus, le propriétaire ou l’usager sera tenu de rétablir les lieux dans leur état antérieur sous peine d’une astreinte prononcée par le tribunal civil à la requête du ministre chargé de la culture ; le montant de l’astreinte, sera versé au Trésor.”À moins que la ministre chargée de la Culture ait donné son accord, sans qu’on l’ait su, l’expulsion prochaine de Montévidéo ne respecte pas la loi et doit être empêchée.
Devant l’urgence de la situation, un post circule sur les réseaux sociaux appelant à l’occupation de Montévidéo à partir du 14 octobre au soir. Même si l’on ignore qui a lancé cette initiative, on est soulagé·es de voir enfin une action se profiler à l’horizon.
En voici la teneur :
Appel à l’occupation massive de Montévidéo le samedi 14 octobre à partir de 22 h :
“À l’attention des artistes, du public, des journalistes, des travailleur·euses de la culture à Marseille et en France. Après des années de lutte, l’espace de création et de rechercher Montévidéo est désormais plus qu’en danger. Le propriétaire est en “droit” d’expulser l’association du lieu dès la fin du festival Actoral, et ce à partir du 15 octobre au matin afin de pouvoir vendre le bâtiment.
Nous demandons au ministère de la culture de soutenir Montévidéo via l’ordonnance de 1945 qui protège la vocation culturelle de ce lieu et de prendre immédiatement ses responsabilités en tant qu’acteur de l’essor culturel à Marseille.
Nous refusons la disparition de Montévidéo au profit d’un projet immobilier.
Il semble impossible de mesurer l’impact de l’arrêt de 20 années de résidences et de création axées sur l’expérimentation artistique. Mais les répercussions sur les artistes et particulièrement les artistes émergents vont être désastreuses. Les lieux de création à Marseille sont déjà trop peu nombreux au regard de la demande et la communauté artistique a tout à y perdre. Ceci est un appel général à l’action pour refuser cette situation indécente et précarisante au nom de la spéculation immobilière à Marseille.
Right to the point : le samedi 14 octobre à partir de 22 h, appel à occuper Montévidéo au 3, impasse Montévidéo, et faire des actions de soutien dans les jours qui suivent : ramenez vos sacs de couchage, vos thermos, votre matériel art and craft pour les banderoles. Pour les non-Marseillais·es : prenez vos billets, le logis est déjà trouvé.
Merci de partager largement ce message et de manifester votre soutien.”
Édito initialement paru dans la newsletter Scènes du 10 octobre. Pour vous abonner gratuitement aux newsletters des Inrocks, c’est ici !
{"type":"Banniere-Basse"}