Les déclarations de Muriel Robin sur l’homophobie du cinéma français ont permis de comprendre que le milieu n’est peut-être pas si ouvert qu’on le pense.
Le 16 septembre 2023, sur un plateau de télévision, Muriel Robin accusait le cinéma français d’homophobie. Selon elle, beaucoup d’acteurs et actrices homosexuel·les cachent leur orientation sexuelle pour pouvoir travailler. Accusation grave. On croyait ces temps lointains, mais rien n’aurait finalement beaucoup changé depuis l’époque du grand Hollywood ?
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Entre 1934 et 1966, Hollywood est régulé par le fameux Code Hays, qui a pour but de “moraliser” le cinéma. Il s’agit en réalité un code de censure. Si l’homosexualité n’y est pas clairement nommée, il n’est pas sorcier de comprendre qu’elle fait partie de tout ce que le sénateur Hays réunir sous le terme de “perversion sexuelle”, dont la représentation est totalement interdite, sauf si elle est décrite et dénoncée par le film comme monstrueuse et pathologique.
Mais la plupart du temps, l’autocensure règne. Les grands studios se plient donc à cette loi. Les plus grands cinéastes (come Hitchcock) parviennent à la contourner. Alors que bon nombre de grandes stars du cinéma (sous contrat avec les studios) furent homo ou bisexuelles, elles ont été contraintes de le cacher pour pouvoir travailler.
Comme le disait Orson Welles, “tout ce qu’on raconte sur Hollywood est vrai, même les mensonges”. Difficile, donc, et d’ailleurs peu importe, de démêler le faux du vrai dans les racontars, les rumeurs, les cancans répandus sur les mœurs supposées des acteurs et actrices de la Babylone moderne, dont Damien Chazelle, récemment, a donné une image très fantasmatique.
Les moguls et publicistes d’Hollywood pensaient bien évidemment avoir trouvé la parade à toutes les rumeurs : le mariage. D’où sans doute, chez beaucoup de ces stars, une instabilité sentimentale récurrente, et une propension à se marier plusieurs fois. D’autres se sont arrangé·es avec leur mari ou leur épouse sans divorcer. Petit tour de table des stars les plus connues pour leurs amours plurielles et éclectiques.
Le temps du muet : Rudolph Valentino et Ramón Novarro
L’une des plus grandes stars masculines du cinéma muet est sans conteste Rudolph Valentino (1895-1926), resté célèbre pour son rôle dans Le Fils du cheik et mort à 31 ans d’une septicémie. Couvert de femmes, il a aussi entretenu des liaisons avec des hommes (on lui prête même des amants en France, notamment le grand homme de théâtre Jacques Hébertot) et s’est marié avec des actrices, dont l’une faisait partie du “Cercle de couture” (le nom secret donné à la communauté lesbienne d’Hollywood).
On raconte aussi que Valentino aurait eu une liaison avec Ramón Novarro, l’autre star masculine du muet des années 1920, célèbre pour avoir joué dans la version de Ben-Hur réalisée par Fred Niblo en 1925, mais aussi pour quelques films parlants, comme Mata Hari avec Greta Garbo. Tiraillé entre son homosexualité et sa foi religieuse (il faillit entrer dans les ordres), il a connu des liaisons plutôt longues avec des hommes. Le 10 octobre 1968, il a été retrouvé assassiné par deux frères adolescents prostitués, qui voulaient lui soutirer de l’argent qu’il n’avait pas, dans sa maison de Laurel Canyon.
L’âge classique d’Hollywood : Marlene Dietrich, Greta Garbo et Katharine Hepburn
Marlene Dietrich collectionnait amants et maîtresses, mais est restée mariée 50 ans avec le même homme, Rudi, à qui elle a refusé toute relation sexuelle après la naissance de leur fille mais qui vivait plus ou moins sous le même toit avec sa fidèle maîtresse, tout en étant au courant des liaisons de sa femme. On lui prête des liaisons avec beaucoup d’autres célébrités : Colette, Gertrude Stein, Édith Piaf, Erich Maria Remarque, James Stewart, Jean Gabin (liaison avérée, ils ont même failli se marier), Raf Vallone, Frank Sinatra, Yul Brynner…
Greta Garbo était aussi bisexuelle. Dans sa jeunesse, elle a eu une relation avec une actrice suédoise nommée Mimi Pollak. Quand elle est partie pour Hollywood, en 1922, elles ont continué à s’écrire jusqu’à leur mort. Et quand Mimi Pollak a eu un fils, dans les années 1930, Garbo lui a envoyé un télégramme disant : “Incredibly proud to be a father” (“Incroyablement fière d’être père”).
L’amour qui a lié Katharine Hepburn et Spencer Tracy est resté légendaire, même si leur liaison a longtemps été adultérine, Tracy refusant toujours de divorcer de son épouse (scandale à Hollywood !). Kate aimait aussi les femmes. Scotty Bowers, proxénète et prostitué, auteur d’un livre de mémoires intitulé Full Service, lui prête 150 amantes – mais Scotty Bowers a le sens de l’exagération. On raconte que quelques jours avant sa mort, Katharine Hepburn aurait légué 100 000 dollars à l’une d’entre elles.
Cary Grant et Randolph Scott, amis ou amants ?
Les deux acteurs ont partagé la même maison de Malibu (surnommée le “Bachelor Hall”, la maison des célibataires) pendant dix ans, de 1932 à 1942, au prétexte qu’ils ne gagnaient pas beaucoup d’argent. Quand le Britannique Grant a été naturalisé américain en juin 1942, Randolph Scott a naturellement été son témoin. Cary Grant s’est marié par ailleurs cinq fois. Entre deux mariages, Grant retournait vivre chez Scott. Une série de photographies publicitaires prises en 1933 montre les deux hommes en train de pratiquer divers sports dans leur maison. Jamais l’un ni l’autre n’a reconnu être homosexuel, même si aujourd’hui, la bisexualité de Grant ne fait plus aucun doute.
Un cas très français : Jean Marais
Jean Marais n’a jamais caché sa relation avec Jean Cocteau ou son homosexualité, mais il ne l’a jamais revendiquée non plus. Il a eu, par ailleurs, une liaison pendant deux ans avec l’actrice Mila Parély (qui joue l’une des deux méchantes sœurs de l’héroïne dans La Belle et la Bête). À la fin de sa vie, il ne parlait plus de Cocteau que comme d’un ami. Étrangement, jusqu’au début de ce millénaire, beaucoup de personnes de la génération (ou presque) de Jean Marais ignoraient totalement qu’il était homosexuel et ne voulaient pas le croire. Une cécité volontaire qui révélait une forme d’homophobie très répandue.
Elizabeth Taylor et ses amis : James Dean, Montgomery Clift et Rock Hudson
Elizabeth Taylor était souvent attirée par les homosexuels. Elle a également été amoureuse de deux stars bisexuelles, Montgomery Clift et James Dean. Au moment de sa mort, ce dernier avait une liaison avec Ursula Andress.
En révélant publiquement qu’il était malade du sida en juillet 1985, Rock Hudson savait parfaitement qu’il était aussi en train de révéler son homosexualité, qu’il avait dû cacher toute sa vie. Claudia Cardinale, pour le protéger, a prétendu qu’ils avaient une liaison, mais rien n’y a fait. Après sa mort, son amie Elizabeth Taylor s’est engagée publiquement en faveur de la recherche contre le sida. Suivie en France, quelques années plus tard, par Line Renaud.
Aujourd’hui : Jodie Foster et Kristen Stewart
Jodie Foster, qui a débuté enfant dans le cinéma, a attendu janvier 2013 et la cérémonie des Golden Globes avant de parler pour la première fois en public de son homosexualité. Pas vraiment une “sortie de placard”, comme elle le dit elle-même : “J’ai déjà fait mon coming out il y a environ mille ans, à l’âge de pierre…” Preuve que l’homosexualité n’est pas si facile à vivre dans le Hollywood de 2013.
Kristen Stewart a souvent affirmé sa bisexualité. On sait qu’elle a eu notamment une liaison avec Robert Pattinson. Elle a aussi raconté un jour que des gens de cinéma lui avaient dit à ses débuts que si elle voulait tourner un jour dans un film Marvel, il valait mieux éviter de se balader dans la rue main dans la main avec sa copine… Les États-Unis, ne l’oublions jamais, c’est aussi Donald Trump.
{"type":"Banniere-Basse"}