Relève d’un folk anglais 2.0, le trio Daughter livre un premier album beau à mourir en forme d’instantanés d’une année intense et tourmentée.
Ils s’appellent Elena Tonra, Igor Haefeli et Rémi Aguilella. La première est anglaise, le deuxième a grandi en Suisse allemande et française, le troisième en Auvergne. Leur point commun ? Londres, où ces jeunes étudiants en musicologie se sont rencontrés sur les bancs de l’école avant de former Daughter, groupe dont le but était aussi de briser la solitude de sa captivante instigatrice.
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“Je jouais déjà en solo depuis quelques années, je m’y étais habituée, mais je n’aimais pas vraiment ça dans le fond. C’était trop dur d’être seule sur scène. J’ai donc demandé à Igor, qui était à l’époque dans ma classe, s’il voulait venir jouer de la guitare avec moi. On a un peu répété, on a donné quelques concerts ensemble et on s’est rendu compte que ça marchait bien. C’est là que Rémi nous a rejoints, parce qu’on aimait beaucoup sa façon de jouer. Après des années passées seule, je crevais d’envie de pouvoir expérimenter et partager des choses avec d’autres gens”, confie la douce Elena.
D’épopée solitaire, Daughter devient alors trio apatride, lequel se retrouve très vite sur les routes après ses deux ep à la beauté épineuse, His Young Heart et The Wild Youth. On y découvre un folk savamment bâti, construit méticuleusement pierre par pierre – des restes de l’école, disent-ils –, mais aussi toujours sur le fil, à fleur de peau grâce aux paroles d’une sincérité déroutante d’Elena. “C’est très thérapeutique pour moi d’écrire des chansons. J’ai toujours écrit de cette façon, depuis mes 12 ou 13 ans. Un moyen de me débarrasser de certaines émotions en les couchant sur le papier. Et maintenant, je fais simplement la même chose en musique. Je crois que je ne réfléchis pas trop à ce que les gens vont penser de moi en écoutant mes paroles. Je devrais peut-être…” (rires)
On ne l’espère pas, car c’est justement ce qui pique à vif dans If You Leave. Enregistré en plusieurs fois tout au long de l’année passée, à la maison ou dans différents studios londoniens, le premier album du trio fait à la fois office de journal intime pour leur troublante meneuse, et de soundtrack cinématographique pour l’histoire du groupe tout entier.
On y retrouve la voix cristalline d’Elena bien sûr, mais surtout, comme chez la Sud-Africaine Dear Reader, le don des trois complices pour les orchestrations mille-feuilles, majestueuses et bouleversantes, de celles qu’on aimerait écouter face aux côtes brumeuses d’Ecosse ou dans la tourmente des nuits blanches postrupture. “Ma mémoire est bien plus visuelle qu’auditive, ce qui est très embêtant pour un musicien, raconte Igor. Quand j’entends un son qui me plaît, je l’associe assez rapidement avec une image, même vague. C’est de cette façon que je sais que telle ou telle mélodie marche.”
If You Leave est justement à l’image de sa gymnastique intellectuelle : aussi visuel que sonore. Et Elena de conclure : “Cet album est la bande originale de notre année.”
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