Sur un deuxième album capiteux mariant folk et world, les Suédois Junip de José González invitent à la transe. Critique et écoute.
Au départ, il y a José González, songwriter suédois que la France entière connaît sans le savoir : sa version majestueuse du Heartbeats de The Knife fit l’objet d’une belle synchro pour une publicité qui peignait un tableau aussi beau que la reprise, faisant dégringoler des milliers de balles colorées dans les rues en pente de San Francisco. Depuis, on aime avec la même passion les albums solo du musicien et ses rares projets avec le groupe Junip, qui publie son deuxième album en quinze ans d’existence. Or chez Junip, rareté rime avec beauté : tout simplement baptisé Junip, ce nouveau recueil est un enchantement aussi bien pour ceux qui aiment Nick Drake que pour ceux qui aiment Tinariwen.
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Né et élevé en Suède par un couple de professeurs exilés d’Argentine, José González a gardé le goût des voyages et des musiques lointaines, jouant aussi bien dans des festivals de rock indé qu’en tournée avec Tinariwen et Sidi Touré. “J’écoute beaucoup de musiques africaines. J’aime cette musique parce qu’elle est méditative. Elle ne commence ni ne finit. Souvent, je peux improviser de la musique en l’écoutant. Je mets un disque, je prends ma guitare, je joue pardessus.”
On ne sait si c’est de cette manière que sont venues à Junip les mesures de l’entêtant Walking Lightly, mais le résultat est stupéfiant. On y entend des cascades de cordes qui fricotent avec un chant de griot dans ce qui ressemble au final à une invitation à la transe – six minutes fulgurantes dignes du meilleur Frànçois & The Atlas Mountains. Sur Baton, Junip laisse aussi transparaître des influences brésiliennes.
De l’album dans son ensemble, le groupe semble avoir voulu faire un disque d’errance, de vagabondage presque, où l’on se perd d’abord plusieurs fois pour finalement se retrouver mieux que partout ailleurs ces derniers temps. “On n’a pas écouté seulement des disques de world. On a aussi écouté des morceaux d’indie-rock dansants, beaucoup de choses des Stone Roses.” So Clear, d’ailleurs, pourrait répondre au mythique Fools Gold de ces derniers : rythmique enivrante, guitares tyranniques, chant capiteux.
C’est probablement là que réside la force de Junip, dans cette façon de sauter avec une cohérence inouïe du baggy au kraut, du folk aride à la pop en arc-enciel. Quand il ne s’agit pas de proposer tout ça à la fois sur un même titre, comme sur l’inaugural et majestueux Line of Fire, qui n’a pas déchaîné les réseaux sociaux pour rien. “Le songwriting reste très frustrant pour moi, conclut González. Il y a toujours un moment dans la chanson où je ne parviens pas à faire ce que je voudrais. Je ne suis jamais pleinement satisfait.” Nous le serons pour lui.
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