Une histoire féminine au cœur du FBI, où une unité forme des spécialistes de l’infiltration. La nouvelle série du créateur de “Yellowstone”. Pas toujours subtile, mais est-ce vraiment le but ?
Connaissez-vous Taylor Sheridan ? Il y a vingt ans, ceux qui régnaient sur le monde des séries s’appelaient Aaron Sorkin, David Chase, David E. Kelley ou encore Alan Ball. À la Maison blanche, Les Soprano, The Practice et Six Feet Under donnaient le ton d’une époque ambitieuse et masculine. Les amateur·rices connaissaient le nom de ces showrunners, leur style était scruté, commenté. Tous ont plus ou moins disparu des radars. Et qui pour les remplacer ? Plutôt des super producteur·rices comme Ryan Murphy ou Shonda Rhimes. Et moins d’artistes clairement identifié·es.
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Que dire alors de Taylor Sheridan dans ce contexte étrange, où les séries sont plus nombreuses que jamais mais leurs créateur·rices souvent invisibilisé·es ? On a croisé le néo-quinquagénaire en tant qu’acteur dans Veronica Mars et Sons of Anarchy, mais c’est son cerveau de scénariste qui plaît. Son script pour le thriller de Denis Villeneuve en immersion dans les cartels mexicains, Sicario, lui a valu une reconnaissance, avant sa nomination aux Oscars pour Hell or High Water de David Mackenzie. Depuis, il cartonne… dans les séries, avec pas de moins de huit (!) shows actuellement, à divers stades de production : le hit Yellowstone, le spinoff de cette dernière intitulé Lawmen : Bass Reeves, Mayor of Kingstown, Tulsa King (avec Sylvester Stallone), 1883, 1923, avant Land Man prochainement et donc Opérations spéciales : Lioness, parce que tout cela ne suffisait pas.
Héroïnes brutales
Dans cette nouvelle série, Sheridan laisse s’exprimer son penchant pour les héroïnes brutales, déjà entraperçu dans Sicario. Cette fois, elles sont nombreuses et diverses : il y a Joe (Zoe Saldaña), agente du FBI en charge de former des membres des forces spéciales, qui jette son dévolu sur une jeune femme cramée par la vie, Cruz (Laysla De Oliveira), sous le regard de sa superviseuse Kaitlyn (Nicole Kidman). Et on en oublie. Ce qu’il fait avec les hommes – les montrer se battre, étaler leur testostérone à la moindre occasion –, le créateur le déplace ici à un groupe de femmes. La série multiplie les coups de force physique autour de l’infiltration de Cruz auprès de la fille d’un terroriste islamiste. Plus tu saignes, plus tu existes.
Ici, rien n’est très fin, mais ce n’est pas forcément le but de Sheridan, pour le dire poliment. Le Texan recherche plutôt une sorte d’équilibre entre les intensités : celle du terrain, avec des scènes d’action féroces, et celle du quotidien, qu’Opérations spéciales : Lioness ne laisse pas de côté dans ses premiers épisodes. C’est d’ailleurs ce qui permet à la série (par ailleurs plutôt accrocheuse) de se fabriquer un peu de chair. La relation entre le personnage de Zoe Saldaña et son mari, par exemple, y contribue.
Mais au bout du compte, Sheridan s’affirme plutôt ici comme un faiseur, déployant ses obsessions pour la violence et “les grosses couilles” (même quand elles sont féminines) avec sérieux et parfois, un certain style. Le Texan appartient pleinement à l’industrie de son époque, qui cherche avant tout de bon·nes soldat·es à son service, capables de se persuader qu’ils ou elles parlent à la première personne. Et à part ça ? À part ça, on se demande un peu ce que Nicole Kidman fait ici, dans un second rôle où, au bout de trois épisodes, il semblerait qu’elle ne se soit pas levée de sa chaise.
Opérations spéciales : Lioness est disponible sur Paramount +
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