Cinquième album du collectif hip-hop new-yorkais et disque solo d’un de ses guerriers : toujours aiguisés.
On ne choisit pas sa famille, sauf quand on rejoint le Wu-Tang Clan. Depuis la bonne quinzaine d’années qu’ils évoluent sous l’une des plus célèbres bannières du rap américain, RZA, GZA, Method Man, Ghostface Killah, Raekwon, Inspectah Deck, U-God et Masta Killa semblent unis à la vie ; mais malheureusement aussi à la mort, tel Ol’ Dirty Bastard, à qui est dédié ce premier album à paraître depuis sa disparition en 2004. Comme dans toute famille, celle-ci n’est pas exempte de conflits à en juger par l’agacement de Ghostface Killah après l’annonce de la sortie de l’album le même jour que son nouveau disque solo ou les reproches de Raekwon au travail de production de RZA.
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Mais peu importe car les vraies familles demeurent soudées dans l’adversité. La preuve avec ce cinquième disque studio du collectif réduit à huit membres et privé du premier single pressenti pour d’obscures raisons de droit sur un sample. Musicalement, le groupe y reste fidèle aux préceptes définis avec Enter the Wu-Tang (36 Chambers), coup de génie initial de 1993 qui a changé la face du hip-hop américain : une production sombre et austère à base de beats rationnés et de samples minimaux et obsédants, qui ne cèdera jamais une once de terrain au r’n’b. RZA préfère jouer la subtilité comme avec l’emploi tout en grâce de la guitare du Bang Bang de Nancy Sinatra sur Windmill. L’hypnotique Wolves, avec ses fines lames de violons acérées comme des sabres, résume un hip-hop peu bavard musicalement mais pas pour autant réticent à quelques fantaisies. La plus étonnante, The Heart Gently Weeps, consiste en une réappropriation casse-gueule de While My Guitar Gently Weeps des Beatles éclairée par la voix d’Erykah Badhu et les guitares de John Frusciante et Dhani Harrison, fils de George. Le groupe dédie Life Changes à Ol’ Dirty Bastard qui ressurgit comme par miracle sur un 16th Chamber enregistré en 1992. Un disque plus qu’honorable pour une année hip-hop qui ne restera pas dans les annales. Avec le titre ambitieux choisi pour son deuxième album de 1997, le Wu-Tang Clan avait en fait raison : Wu-Tang Forever.
Pendant ce temps, Ghostface Killah a récupéré le titre de membre le plus prolifique en solo. Après deux bons albums en 2006, le rappeur parvient encore à se renouveler en ressassant les mêmes thèmes éculés : gangsters, drogues, etc., sur une production pour moitié due aux Hitmen, le duo de P. Diddy. Sa recette ? Un hip-hop urbain mais plus ludique que celui de son groupe, porté sur la soul à l’image du sublime Walk Around et de son sample de Little Milton tandis que I’ll Die for You magnifie un emprunt aux Independents.
Disponible :
– Wu-Tang Clan : 8 Diagrams (Wu Music Group/Bodog/Pias)
– Ghostface Killah : The Big Doe Rehab (Def Jam/Barclay/Universal)
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