Dans la liste des “petites” séries dont vous n’avez peut-être jamais entendu parler, mais qui méritent l’attention pour les extirper en douceur du grand flux streamé et mondialisé, “Minx” figure en bonne place.
Dans Minx, pas de stars, ni sur l’écran, ni derrière, et une existence qui ne tient qu’à un fil. Alors que la deuxième saison – oui, nous sommes déjà en saison 2 – était presque en fin de tournage, la chaîne HBO Max a annoncé en 2022 son annulation, avant que la concurrente Starz ne décide de rapatrier l’affaire en son sein, sauvant une équipe et quelques fans du désarroi. Aujourd’hui encore plus qu’hier, les séries meurent souvent, mais il n’y a quasiment plus personne pour s’en émouvoir. Parfois, elles ressuscitent, un miracle rarissime il y a seulement cinq ans. Étrange paradoxe.
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De quoi parle Minx, au fait ? D’une douce utopie située dans les années 1970, la naissance à la fois joyeuse et chaotique d’un magazine érotique féministe. Joyce Prigger (Ophelia Lovibond, vue dans Les Gardiens de la galaxie) s’associait durant la première saison à un éditeur de porno de bas étage, Doug Renetti (Jake Johnson), un type sympa, souvent flamboyant et surtout ouvert à ses idées.
Luttes de pouvoir
Les premiers épisodes, qu’il est toujours possible de rattraper, montraient comment le point de vue d’une femme sur la sexualité pouvait secouer une société qui n’avait pas vraiment absorbé la révolution des sixties. Ils montraient aussi comment le capitalisme américain règne en maître, peu regardant sur les contenus mais exigeant de tous·tes une rentabilité immédiate. Joyce voguait entre deux eaux. La série valait d’abord pour la manière dont celle-ci commençait dans la peau d’une femme timide et incapable de se trouver vraiment légitime, pour devenir celle qui affirme : “Je ne suis pas sûre de vouloir céder mon pouvoir.”
Dans la deuxième saison qui vient de débuter, Joyce fait le tour des popotes médiatiques pour parvenir (elle l’espère) à faire grandir son idée, à la recherche d’un “vrai” éditeur. Et rien n’est simple, même quand Condé Nast – la maison-mère de Vanity Fair – se trouve dans la pièce. Rentrer dans le game impose des règles. Minx décrit la manière dont les idées plus ou moins underground se font une place dans la pop culture majoritaire et ajoute au duo initial la figure d’une riche investisseuse qui veut faire du magazine sa “danseuse”, son supplément d’âme en pleine vague porno – il est même question de Gorge profonde et de son impact sociétal.
Le féminisme est-il soluble dans l’ultralibéralisme ? La série pose cette question – comme Barbie le fait à sa façon. Il semblerait qu’après l’idéalisme post-MeToo, l’heure soit à une forme d’introspection. Cette introspection si contemporaine, Minx la mène tambour battant, et cela fait son prix. La création d’Ellen Rapoport se démarque par sa manière d’accompagner des personnages un peu paumés dans la jungle américaine avec humour et tendresse, bien au-delà de son duo central. Elle fait partie de ces séries auxquelles on s’attache sans totalement comprendre pourquoi, à force de regarder des hommes et des femmes qui lutter pour exister, en cédant le moins possible sur leurs désirs.
Minx saisons 1 et 2. Disponible sur OCS et via MyCanal.
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