Stéphane Dafflon fait à nouveau la démonstration que la peinture émarge dans et autour du tableau, dans l’espace et sur la toile.
Le peintre lausannois refile un bon tempo, fluide et tressautant, à la peinture géométrique. Autant qu’une exposition de peintures, c’est un très bel accrochage, plein de décrochages et de ricochets, que déroule Stéphane Dafflon. Pour ainsi dire, ses toiles ne pendent pas aux murs. C’est l’inverse : les murs et l’espace entier de la galerie sont comme suspendus aux toiles. Lesquelles en effet ont décidé de prendre le dessus. Il ne s’agit pas de tout casser, de tout renverser, de forcer l’espace, mais plutôt de courber l’échine, de plier, de se faire tout souple, de danser – le swing, ainsi que le titre de l’expo le promet.
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Une expo géométrique
Comment ? En suivant un protocole strictement défini : le format de chacun des tableaux est déterminé par les dimensions de la porte ou du passage qui s’ouvre dans le mur où il est accroché, plus précisément il fera la moitié en longueur et en largeur de cette ouverture. En somme, les toiles dépendent des brèches et des interstices de l’espace d’exposition. Quant aux murs, l’artiste s’est occupé d’en faire divaguer les proportions.
Peignant leurs marges de minces lignes effilées qui s’aventurent en plein milieu (ou au tiers), Stéphane Dafflon divise les cimaises en deux zones assez distinctes. Ce qui a pour effet de décentrer les toiles et donne finalement l’impression que ce sont les salles qui ont pivoté sur elles-mêmes, comme la face d’un Rubik’s Cube tourne sur son axe. Swing encore, donc. Ou valse, à trois temps : parce qu’après ce premier tour de piste où ont joué les formats, les ouvertures, l’accrochage, vient le temps des lignes sur les toiles.
Des lignes fuyantes, brisées ou continues
Elles filent là, aussi discrètement que sur les murs : très fines, elles longent les bords (comme elles rasaient les murs) et cernent le centre du tableau, laissé vide, blanc, déserté. Sauf, dans certains cas, où les lignes bifurquent en angle droit vers le milieu de la toile. Mais même alors, elles peinent à arriver au bout et s’étiolent progressivement jusqu’à lâcher l’affaire, se contentant de souligner un emplacement vide, un peu comme le font ces étiquettes sur les cahiers où l’écolier inscrira son nom.
Remplir, recouvrir, ce n’est pas le problème de la peinture de Stéphane Dafflon, qui préfère filer en douce et se faufiler en évitant le centre. Les couleurs, funky, suivent ou donnent d’ailleurs la cadence : elles se nuancent de toutes les couleurs de l’arc-en-ciel, dans un long fondu enchaîné chromatique.
Judicaël Lavrador
Swing jusqu’au 6 avril, à la galerie Air de Paris, Paris XIIIe, www.airdeparis.com
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