Avec son sixième album, Queens Of The Stone Age se réinvente une vie et un son. Ce disque, dont l’accouchement fut difficile, est aussi celui qui révèle le plus Josh Homme, son leader charismatique.
Josh Homme, 40 ans tout juste, est le patron du tatapoum mondial. Boss de Queens Of The Stone Age (dites QOTSA), mais aussi de Eagles Of Death Metal et de Kyuss (récemment rebaptisé Vista Chino), c’est aujourd’hui pour le compte du premier groupe (qui sort son sixième album, …Like Clockwork) que le père Homme reçoit.
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Il est grand, il est beau (pour un roux), et c’est dans un grand cache-poussière gris qu’il entrouvre la porte et demande aux jeunes gens qui peuplent la pièce de faire un peu moins de bruit. Rapidement, le groupe l’entoure. Autour de lui, Troy Van Leeuwen (guitare), Michael Shuman (basse) et le nouveau batteur, Jon Theodore, tout juste débarqué de The Mars Volta (sur …Like Clockwork, c’est Dave Grohl qui s’occupait des fûts – la classe).
Avant qu’on lui pose la moindre question, Homme prend la parole, tel un chef sioux du nord du Danemark. “Je crois que c’est l’album que nous avons eu le plus de mal à enregistrer.” Van Leeuwen et Shuman, qui étaient dans le coup, acquiescent. Theodore joue sur son smartphone.
“Pour la première fois, j’avais le sentiment d’être à sec, cuit. J’avais vécu des trucs dans ma vie qui m’avaient vidé de mon énergie. Je ne savais plus à quoi ressemblait un disque de Queens Of The Stone Age, je n’arrivais plus à écrire. Je ne me sentais même plus le courage d’aller en studio. J’ai réuni les mecs, on s’est enfermés quelques jours. Et puis c’est arrivé comme ça, c’est revenu. On ne faisait pas de plans, on essayait simplement de trouver un équilibre. Les morceaux se sont construits comme ça dans ma tête, et l’énergie est revenue au fur et à mesure. Ensuite, on a fait une liste de gens avec qui on aimerait bosser. Alex Turner des Arctic Monkeys, Trent Reznor, les habitués Mark Lanegan et Nick Oliveri, Elton John, ouais, Elton John, et aussi Dave Grohl, qui a accepté de venir faire le batteur.”
Grohl avait déjà été batteur de QOTSA pour le troisième album du groupe, Songs for the Deaf. Un disque viril mais pop dont …Like Clockwork pourrait être le parfait successeur. “Cet album possède une lumière toute particulière, une lumière qui s’est posée sur le disque lentement, une lumière que les copains qui venaient enregistrer nous aidaient à polir chaque jour. La leçon que j’ai tirée de ce disque, c’est qu’après tout ce temps passé à écrire, jouer et tourner, je suis un mec assez entouré. J’ai reçu beaucoup de soutien de tous les gens qui sont sur le disque, à un moment où j’en avais besoin.”
Celui avec qui Homme a passé le plus de temps, c’est Trent Reznor (cerveau de Nine Inch Nails), grand habitué des hauts et surtout des bas, qui a été son confident tout au long de la genèse et de l’enregistrement de …Like Clockwork. “Avant ce disque, j’avais l’impression d’être un mec tout-puissant, une sorte de winner total. Et puis mon monde s’est effondré. Trent est le genre de type à pouvoir comprendre ça, il est passé par tellement de moments difficiles dans sa vie qu’il a été une oreille particulièrement attentive et généreuse pour moi. Il m’a aussi fait comprendre comment la musique avait toujours été pour lui une façon de rebondir, de se relancer. C’est un type extraordinaire. Ce disque lui doit beaucoup.”
Ce sixième album du groupe, avec son entame un peu bluesy (Keep Your Eyes Peeled), la lente marche de The Vampyre of Time and Memory (l’un des plus beaux morceaux du disque) ou les entrechats de If I Had a Tail (entre les Stones et Duran Duran), refroidira certainement les plus durs des fans de QOTSA.
Pour autant, dans la discographie quasi irréprochable et cohérente de ce groupe déjà mythique, il ne fait pas tache. …Like Clockwork connaît ses accélérations (My God Is the Sun, morceau lancé en éclaireur), ses moments de grâce (Kalopsia, à provoquer une pelade à tout ce qu’il reste de Led Zep) et son apogée (dans l’ordre, Fairweather Friends, Smooth Sailing, I Appear Missing et l’éponyme et sublime …Like Clockwork, joués le cœur grand ouvert par un Homme nouveau, fragile et rédimé).
Josh Homme : “Je sais que nos supporters les plus hardcore seront désarçonnés (et Dieu sait s’il en existe, comme le Français Olivier Libaux, qui vient de consacrer un disque entier à des reprises cocasses du répertoire de QOTSA – ndlr). Mais cet album était nécessaire, c’est celui qui a tenu le groupe ensemble, et surtout, celui qui m’a ‘tenu ensemble’. C’est aussi un disque qui m’a ouvert encore un peu plus. Certains le regretteront, moi pas.”
Le sourire revenu, Homme checke ses acolytes, nous regarde droit dans les yeux et lance une sorte de défi. “C’est surtout un disque que nous allons prendre plaisir à jouer sur scène, je n’ai aucun doute là-dessus.” Homme sort une grande main, nous la tend, et lance alors une de ces phrases définitives dont il a le secret : “Tu as tout ce qu’il te faut : il est désormais temps pour moi de commander des gambas.”
Pierre Siankowski
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