Après les “Vies et mort de Mike Brant”, Serge Airold déchaîne tous les feux de la littérature avec ce récit entre évocation historique, réflexion politique et embardées poétiques.
Serge Airoldi nous avait subjugué·es en 2021 avec Si maintenant j’oublie mon île –Vie et mort de Mike Brant (L’Antilope). Avec L’Épreuve, il sidère avec une autre vie : celle de Carlo Airoldi, probable ancêtre de l’auteur ou quasi-homonyme, qui, au tournant du XIXe et du XXe siècle, décide de ne pas rater le virage.
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Gaillard du nord de l’Italie, travailleur des champs déclassé en prolétaire des villes, Carlo, pour s’échapper, c’est assez littéral, se met à courir. Éperdument, pendant des kilomètres, jusqu’à oublier ses pieds blessés par l’effort.
Quel est son but ? “Il a toujours désiré partir, traverser un miroir et maintenant il rêve d’aller ailleurs qu’à l’usine et à Milan.” Jusqu’à apprendre, en 1896, une nouvelle qui va donner un sens unique à ses échappées. À Athènes vont avoir lieu les premiers Jeux olympiques modernes, avec pour discipline vedette le marathon. 42 kilomètres à fond de train, autant dire une rigolade pour Carlo le fonceur. Il n’a plus qu’une obsession : participer et, bien sûr, gagner.
Carlo espère se mesurer à la course avec un cheval monté par Buffalo
Le dénouement de ce rêve est un cauchemar : fraudes, trucages, trahison, avec en toile de fond le panorama politique d’un jeune royaume d’Italie déjà avide de conquêtes en Abyssinie, les effets de la mal nommée révolution industrielle, qui travaille à plus de soumission des pauvres, et les expéditions militaires de Gabriele D’Annunzio, notamment à Rijeka, qui ne seraient que bouffonneries grandiloquentes si elles ne préfiguraient pas le fascisme.
Mais aussi, plus intrigant, la rencontre de Carlo avec Buffalo Bill, lors du passage de son Wild West Show à Milan en avril 1890. Carlo espère se mesurer à la course avec un cheval monté par Buffalo. C’est assez dire la folle fantaisie qui emporte L’Épreuve, tel un grand art de la fugue romanesque qui finit par dévoiler un mystère, latent dès les premières pages : “Je suis Carlo Airoldi”, écrit Serge Airoldi.
L’Épreuve de Serge Airoldi (Éditions Inculte), 192 p., 19,90 €. En librairie.
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