De Marina Gomes à Aina Alegre, les chorégraphes invitées en ouverture de cette édition auront fait danser la cité.
Le théâtre, en plein air, de La Sucrière n’est pas exactement sur la carte touristique marseillaise. En lisière d’un parc, il attend ce dimanche les danseur·euses et amateur·rices convoqué·es par Marina Gomes. Cette chorégraphe, après Toulouse et la Colombie, a inscrit son hip-hop dans les quartiers défavorisés de Marseille. En deux courtes pièces, Asmanti puis Bach Nord, elle aura mis KO debout le public. Et nous avec.
La créatrice est repartie de la rue, donnant du sens à une gestuelle trop souvent édulcorée à force de fréquenter les salles. Sa danse fait dans l’urgence, joue avec les clichés pour mieux les exp(l)oser. Asmanti (Midi-Minuit) a des allures de court-métrage énervé avec ces courses et ces arrêts sur image, puise à l’énergie des danses urbaines, regarde du côté d’Hofesh Shechter aussi, fait acte de résistance. En regard, Bach Nord (Sortez les guitares), avec une quinzaine d’amateur·rices en plus des interprètes de Marina Gomes, prend le contre-pied de Bac Nord, film décrié du réalisateur Cédric Jimenez, pour montrer, avec ses modestes moyens, le revers de la médaille. On y guette l’autre, on s’affronte, on se soutient. Les guitares ont des rifs de “kalach”, la peur change constamment de camp. La bande-son, Bach à la sauce d’Arsène Magnard, fait le reste. Sur la dalle de la Sucrière, la poésie des corps emportera tout.
Transe collective
Aina Alegre s’est vue offrir de prendre La Citadelle de Marseille, lieu historique en voie de réhabilitation surplombant le vieux port. Parades & Désobéissances est une sage déambulation pour une centaine de participant·es. Suite à un appel à danser, la chorégraphe a imaginé cette transe collective au soleil couchant. Elle puise dans sa mémoire, imagine des pyramides humaines comme dans les fêtes catalanes, enchâsse des rondes et des affrontements, épuise le mouvement. Le plaisir de cette foule prise dans “un grand geste commun, unique et éphémère” va se révéler contagieux.
Avec cette seconde édition sous sa direction, Marie Didier réaffirme une certaine forme d’engagement citoyen à l’heure des replis en tour genre. La ville sera son terrain de jeu, que ce soit, dans les jours à venir, un salon de coiffure et le Haircuts by Children de Darren O’Donnell, ou la Place d’Armes du fort Saint-Jean avec Ali Chahrour. Et lorsque le public est convié à “rentrer” au théâtre, c’est pour croiser Bintou Dembélé, Raymond Dikoumé ou Salma Salem. Cherish Menzo, incandescente soliste, de la pièce de Benjamin Kahn, Sorry, But I Feel Slightly Disidentified, a d’ailleurs joué les meneuses en ouverture de programme. La plupart des propositions sont d’ores et déjà complètes, preuve que le festival de Marseille joue définitivement dans la cour des grands de l’été. Une âme en plus.
Festival de Marseille, jusqu’au 9 juillet