Le cinquième album de la chanteuse américaine est un savoureux triangle musical et amoureux. Par ses thèmes puissants et sensuels, il s’agit d’un disque bien plus radical qu’en apparence.
Juste avant la sortie de son cinquième album, Janelle Monáe n’avait qu’un seul mot d’ordre : “Titties out !” Une note d’intention claire et hédoniste, élégant coup promotionnel attirant à la fois les projecteurs sur les corps et sur la musique. Les corps d’abord : son dernier single, Lipstick Lover, est accompagné du clip le plus torride de l’année, sorte de giga partouze à peine voilée dans une villa californienne, où les convives font des pancakes entre deux léchages de fesses, vident des tubes de chantilly avant de sauter en tenue d’Eve dans la piscine. Terriblement bien réalisé, on y contemple la chanteuse américaine trônant dans le péché, mais affirmant aussi, entre les lignes et les bisous, une fierté noire de façon plus explicite encore que dans sa précédente discographie.
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Mais d’un coup, en un changement de piste, retentissent des cuivres très reconnaissables, gras et épiques, ceux de l’afrobeat originel, venant presque se télescoper aux éléments nigérians actuels et électroniques le temps d’un titre, à savoir Paid In Pleasure, sensuel lui aussi. Janelle Monáe entrecoupe le tout de ses influences rap sudistes, elle qui a réellement débuté sa carrière à Atlanta il y a de cela vingt ans maintenant, et qui la prolonge ici de la plus libérée des manières.
Un triangle sonore entre Atlanta, Lagos et Kingston
Et il y a donc la musique, indissociable du propos. Intitulé The Age of Pleasure, cet album forme un triangle sonore entre Atlanta, Lagos et Kingston, entre États-Unis, Afrique et Caraïbes. Lipstick Lover, d’ailleurs, est un reggae moderne dans la tradition récente du genre, savamment américanisé, ouvrant la voie à d’autres explorations jamaïcaines.
Car Janelle Monáe n’a de cesse de faire des allers-retours entre le passé des styles et leur présent. Sur Only Have Eyes 42, elle va sampler un vieux classique de l’île, à savoir The Loser de Derrick Harriott et son piano légèrement dissonant, paru en 1967, pour le transformer en dubplate puis en pop, lui faisant traverser les âges illico. C’est très bien vu.
The Age Of Pleasure (Atlantic/Warner). Sortie le 9 juin.
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