À Buenos Aires, deux employés de banque font le rêve impossible de braquer le coffre-fort et de ne plus jamais travailler. Une ode à la désobéissance assez jubilatoire.
La Flor, Trenque Lauquen, le cinéma argentin est en train de se spécialiser dans les grandes fresques romanesques. Avec ses plus de trois heures sur la balance, Los Delincuentes est un enchantement constant, et ce même s’il n’atteint jamais l’amplitude narrative des deux films-fleuves cités plus haut. Il s’ouvre sur le quotidien morose de Morán, un employé de banque qui saisit un jour l’opportunité de vider le coffre-fort de sa propre banque. Son plan ? Cacher le butin, se rendre à la police pour purger les trois ans et demi de prison prévus pour un tel larcin puis couler des jours heureux le reste de sa vie. Mais pour cela, il a besoin de l’aide de son collègue Román, qui éprouve plus que lui, un dilemme moral.
Anarchiste, l’idée qu’il vaut mieux purger trois ans et demi en prison, et être ensuite libéré de tout souci financier le reste de sa vie que travailler quasiment toute son existence en tant qu’employé de bureau est un bon “Tu préfères”.
Mort au déterminisme social
Cette fable aux accents genetien (l’homosexualité en moins) est jouissive, mais aussi émancipatrice quand elle fait l’éloge de la désobéissance au profit du déterminisme social, de l’injustice de classes, et de l’esclavagisme moderne que représente parfois le travail. Los Delincuentes pose aussi une question vitale : que serait une belle vie ? Une vie tournée vers l’amour déjà, la nature ensuite. Comme beaucoup de films vus lors de ce festival, la nature y est dépeinte comme un refuge et le film prend à mesure qu’il avance un air de joyeuse robinsonade.
Los Delincuentes de Rodrigo Moreno est présenté en sélection Un Certain Regard
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