Chaque semaine, le meilleur des expos art contemporain, à Paris et en province.
Peter Campus
« Video ergo sum ». Je me filme, donc je suis. Le titre de l’une des trois nouvelles expositions du Jeu de Paume résonne comme le slogan de l’homme moderne – qu’on aurait pour sa part pupu nommer « homo instagramus », histoir de rester dans la tonalité. Et pourtant, s’annonce sous ce titre l’exposition consacrée à l’artiste Peter Campus, né en 1937. Pas un digital native donc, mais au contraire l’un des pionniers de l’art vidéo, dans la lignée de Bruce Nauman, Nam June Paik, Vito Acconci ou encore Bill Viola – mis à l’honneur il y a trois ans au Grand Palais, et qui fut un temps son assistant. Chez Peter Campus, c’est toute l’histoire d’un médium, la vidéo, que l’on voit retracée, depuis les premières exposition du mitan des années 1970 jusqu’aux expérimentations numériques pixel par pixel de ses œuvres contemporaines. Sensitives, psychologiques, sollicitant le travail mental de la vision, ses œuvres son fondamentales pour comprendre le régime des images dans lequel nous vivons – et jusqu’alors trop peu connues en France.
« Video Ergo sum » de Peter Campus, du 14 février au 28 mai au Jeu de Paume à Paris
Alexandre & Florentine Lamarche-Ovize
Chez les artistes, l’artisanat est à la mode. Ou plutôt, ce qui s’annonce comme une tendance plonge ses racines dans des raisons plus sociologiques, marquées par la volonté de se réapproprier un « faire » qui, à force d’être dématérialisé, nous échappe. Faire de la céramique, un geste politique à rapprocher de celui du mouvement « maker » ? L’hypothèse tient. De manière moins explicite, le duo d’artistes Alexndre et Florentine Lamarche-Ovize orchestrent au fil de leurs œuvres une prédilection pour le motif, le décoratif, le bricolage et le fait main, concilié à un faisceau de références pop et baroques. Au Parc Saint Léger, l’occasion sera fournie de découvrir l’étendue de leur pratique, où un thème visuel, une référence, se retrouve répercutée à travers plusieurs médiums, passant du dessin à la céramique avec un détour par l’animation vidéo, empruntant leurs techniques aussi bien à l’artisanat mexicain qu’à la tradition nivernaise du travail de la faïence. En parallèle à cette exposition à Nevers, intitulée « Les motifs sauvages », ils présentent également une proposition dans le project-room de la Galerie G-P&N Vallois à Paris.
Alexandre & Florentine Lamarche-Ovize, « Les motifs sauvages » du 18 février au 30 avril au Parc Saint Léger à Pougues-les-eaux et « Nos paradis perdus » jusqu’au 25 février à la Galerie G-P&N Vallois à Paris
Alexander Lieck
Alexander Lieck est peintre. « Paint ! », claironnait ainsi d’entrée de titre sa dernière exposition à la Galerie Joseph Tang. Né en 1967 à Berlin, passé par la prestigieuse Rijksakademie à Amsterdam, s’y donne à lire la grande peinture qui hérite de la tradition d’Europe du Nord, celle de Berlin donc, mais aussi de l’école de Düsseldorf, qu’il côtoya et où il exposa, succédant à des maîtres à la prestance parfois étouffante comme Gerhard Richter ou Martin Kippenberger (pour Berlin), Sigmar Polke ou Blinky Palermo (pour Düsseldorf). Seulement, Alexander Lieck donne à voir une manière fluide et rapide, où l’esquisse fait deviner que l’idée prévaut à la dextérité et à la mythologie du peintre. Sa nouvelle exposition à Paris ne dit pas autre chose, se penchant, par le prisme de cette tradition là, sur le chevet de l’Europe : une Europe elle-aussi revenue à l’état d’ébauche, qu’il s’agira de reconstruire – quand bien même ce ne serait qu’en peinture.
« Mon Europe (version réduite) » d’Alexander Lieck, jusqu’au 18 mars à la Galerie Joseph Tang à Paris
« L’Institut d’Esthétique »
Entre l’esthétique, la science du beau, et l’esthétique, celle qui se pratique en salon, y aurait-il plus qu’une homonymie ? A Glassbox, le project-space se transformera le temps d’une expo en « Institut d’Esthétique » – c’est le nom de l’expo, mais aussi la réalité effective que l’on y découvrira. Rassemblant 10 artistes ou duos d’artistes, cette idée un peu farfelue découle en réalité de l’envie de réinjecter du relationnel dans l’esthétique, via deux espaces de « soins » accessibles sur rendez-vous. Au choix, un « soin acousmatique vocal et sifflé pour deux oreilles et yeux clos » par Louise Ronke-Senges, une « scéance de lithothérapie » par Vincent Voillat ou encore une « séance de pose de prothèse » par Matthias Garcia. Le corps artiste sera augmenté ou ne sera pas.
« L’Institut d’Esthétique » (cur. Emile Degorce-Dumas et Haily Grenet) du 17 février au 5 mars à Glassbox à Paris
Projection vidéo : Eric Baudelaire
Dans le cadre du cycle de projections et de rencontres « Vidéo et après », le Centre Pompidou invite Eric Baudelaire, dont certains se souviendront de l’exposition solo « The Secession Sessions » au centre d’art Bétonsalon en 2014, étonnant projet autour de l’Abkhazie, pays à l’existence physique bien réelle mais reconnu par aucune autre nation. Cette fois, il viendra présenter sa vidéo « L’anabase de May et Fusako Shigenobu, Masao Adachi et 27 années sans images », racontant l’exil clandestin au Liban d’un ancien leader de l’Armée Rouge Japonaise, groupe terroriste des années 1970. Basé ici aussi sur une correspondance avec l’artiste, comme ce fut le cas pour « The Secession Sessions », l’artiste demande à un réalisateur de l’avant-garde japonaise, lui aussi actif au sein de l’Armée Rouge, d’imaginer les images qu’il lui est interdit de faire, croisant destinées personnelles et fictions imaginaires. La projection sera suivie d’une conversation avec Marcella Lista, conservatrice au Centre Pompidou.
Projection de « L’anabase de May et Fusako Shigenobu, Masao Adachi et 27 années sans images » d’Eric Baudelaire, lundi 13 février de 19h à 21h au Centre Pompidou à Paris