Le quartet californien Cindy s’est produit ce mercredi 3 mai au Café de Paris, et a joué à perte pour ses fans de la première heure. Un miracle permis par la passion d’artistes et de bookers même pas rémunérés pour l’occasion.
Paris est un gruyère : tunnels, voies ferrées, parkings, bunker présidentiel, catacombes. C’est à se demander comment la ville parvient à ne pas s’effondrer sur elle-même. À croire que les fondations de l’underground sont plus solides qu’on ne l’imagine. D’autant plus solides apparemment, que des petites mains ouvrières, peu nombreuses mais suffisamment bien organisées, aménagent des corridors souterrains reliant la capitale à la province, Londres, Manchester, New York, ou San Francisco, et tissent un réseau planétaire informel et horizontal, que l’on pourrait désigner sous les noms pompeux d’Internationale Indie ou de Nouvel Ordre Jedi Pop.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
L’underground, le souterrain, ce sont des images, bien sûr. Ainsi, mercredi soir, le quartet californien Cindy était de passage au Café de Paris, rade situé rue Oberkampf, à la surface du onzième arrondissement parisien. Et si la bande à Karina Gill, signée sur le label londonien Tough Love Records, a pu faire le déplacement, c’est notamment grâce aux efforts conjugués de jeunes gens qui n’ont jamais oublié la puissance d’évocation des posters qui recouvraient les murs de leur chambre d’adolescent·e et l’émotion suscitée par le crépitement du diamant sur les vinyles de Pavement, Mazzy Star ou The Replacements.
Un concert à perte
Dans le cadre du cinquième anniversaire du site indépendant Section 26 (monté dans l’urgence par l’ancienne rédaction de la revue Magic, un an après le début du premier quinquennat Macron), le plateau ce soir-là réunissait le cow-boy rêveur de Montauban Rémi Parson, le trio Chiens de faïence, qui ressuscita l’espace d’un instant l’esprit du Sidewalk Cafe, épicentre de la scène anti-folk new-yorkaise de la fin des années 1990, et Cindy, donc, venu de très loin après une petite tournée UK. Et ce, notamment grâce aux castagneurs de La Bagarre, agence de booking 100 % faite main, également aux manettes de la programmation du Café de Paris, lieu de brassage culturel où se côtoient joueurs de dominos et indie kids.
Des concerts, à Paris, il y en a tous les soirs. Quoi de plus banal ? Les grands festivals empilent tellement de noms d’artistes prestigieux qu’ils payent des sommes tellement barjots, qu’on oublierait à quel point la venue d’un groupe comme Cindy, qui joue à perte et se ruinerait presque pour pouvoir franchir la frontière qui sépare désormais l’Union européenne de l’Angleterre, est un miracle qui ne tient qu’à un fil : celui de la passion de quelques-uns, artistes et bookers, même pas rémunérés pour faire ce job essentiel de passeurs.
{"type":"Banniere-Basse"}