Des pyromanes madrilènes rallument la flamme de la soul-funk à l’ancienne.
L’an passé, l’excellente compilation Sensacional Soul levait le voile sur un pan méconnu de l’histoire musicale espagnole : elle révélait que, dans les années 1960 et 1970, la péninsule ibérique avait été le théâtre d’un véritable soulèvement de forces soul-funk. A peine déterré, ce brûlant dossier s’enrichit aujourd’hui d’une pièce de choix avec le premier album de The Sweet Vandals. Regroupé autour de Mayka Edjo, une Madame 100 000 volts experte en électrochocs vocaux, ce quintette madrilène assène une magistrale leçon de pyromanie : une section rythmique sur les nerfs, une guitare terriblement aiguisée et un orgue bien saignant suffisent ici à pulvériser ce petit bois dont on fait les grands brasiers. Après Sharon Jones ou Nicole Willis, voici une preuve supplémentaire que la soul n’est jamais aussi torride que lorsqu’elle s’affiche dans le plus simple appareil et s’écorche jusqu’à l’os. Les chansons hautement calorifiques des Sweet Vandals diffusent une capiteuse odeur de chair cramée, qui tranche avec les insipides parfums de synthèse dont s’aspergent tant de représentants de la scène r’n’b. Ici et là, des voix s’élèveront pour fustiger le côté rétro, voire réac, de cette entreprise. Argument oiseux : critiquerait-on un claveciniste parce qu’il ne joue pas les Sonates de Scarlatti sur un synthétiseur ? Certes, les Sweet Vandals croient dur comme fer aux vertus d’un groove à l’ancienne, sec et sans trucages, comme en témoigne leur reprise teigneuse du Papa’s Got a Brand New Bag de James Brown. Mais loin de pleurer un âge d’or révolu, leur musique ne cesse de proclamer que ce passé-là a encore de beaux jours devant lui.