Avec un premier album reliant le rock’n’roll des fifties au laptop, le Néo-Zélandais en costard Willy Moon invente le twist 3.0. Il évoque son parcours pour les Inrocks.
Comment te sens-tu à quelques jours de la sortie de Here’s Willy Moon, ton premier album?
C’est la première fois que je sors un disque, c’est très excitant. Pour moi c’est aussi la possibilité de fermer un chapitre. J’ai été obsédé par ce disque ces trois dernières années, j’ai tout vécu par son prisme. C’est un soulagement qu’il sorte.
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Tu es né et a grandi en Nouvelle Zélande. Tu résides à Londres depuis quelques années. Peux-tu me résumer ton parcours ?
Je suis né en Nouvelle Zélande et j’ai perdu ma mère, victime d’un cancer, à l’âge de douze ans. Quand ma mère est morte, mon père est parti travailler en Arabie Saoudite et je suis resté en Nouvelle-Zélande avec ma sœur. Ma sœur ne m’a jamais dit ce que je devais faire ou pas, j’avais beau être avec elle, je me sentais seul. C’est la raison pour laquelle j’ai quitté la Nouvelle-Zélande pour rejoindre Londres à ma majorité. Je me suis dit que quitte à être seul dans la vie, autant être seul dans une ville excitante. En Nouvelle-Zélande, j’avais toujours eu l’impression de passer à côté de l’essentiel. J’étais convaincu que la vie était faite de choses formidables, mais que je ne pouvais y avoir accès là-bas. Le pays est trop bucolique, trop confortable. Ce n’est pas le genre d’environnement qui peut vous amener à l’art ou la création. Pour ça, il faut vouloir se battre.
Connaissais-tu Londres ?
Oui j’y avais effectué quelques séjours enfant : mes parents, des professeurs intérimaires, y ont réalisé une série de remplacements. A l’époque déjà, ma sœur et moi étions livrés à nous-mêmes dans cette grande ville. On se promenait seul, on a fait tous les musées de la capitale : British Museum, V& A Museum… Le vendredi midi, on traversait la Tamise pour regagner la rive gauche et les concerts de jazz donnés à l’heure du déjeuner. J’étais très jeune pour me promener ainsi dans cette grande ville. Mais j’ai alors réalisé que tout le monde imaginaire lié à l’art que j’avais dans la tête existait vraiment. Londres rendait mes rêves possibles.
Que s’est-il passé quand tu es arrivé à Londres pour y vivre ?
A dix-huit ans, j’ai pris un billet simple pour Londres. Et j’ai très vite déchanté. Je suis devenu peintre en bâtiment pour subvenir à mes besoins. Je vivais dans le sous-sol sans fenêtre d’une ancienne usine dans le quartier populaire de Seven Sisters. J’avais un boulot abominable dans une ville grise et glauque que je méprisais. Je me sentais comme un héros de Dickens arrivant le cœur rempli d’espoir aux Etats-Unis et découvrant au contraire la plus sinistre des villes. Quand je ne travaillais pas, je prenais des drogues. Je cherchais l’amour et l’inspiration.
Tu l’as d’ailleurs trouvé, l’amour ?
J’ai rencontré ma petite amie Sasha Rainbow, une photographe. Nous sommes tombés amoureux instantanément. Nous avons décidé de partir : on est d’abord passés par le Maroc. Nos cartes de crédit étaient bloquées, on n’avait plus rien. On a fini chez une amie artiste à Berlin. C’est là que j’ai commencé à écrire mes chansons. Mon but était de créer quelque chose qui m’appartienne, d’agencer mon propre monstre. Il fallait que je trouve un sens à ma vie. Jusque là, mon existence n’avait été qu’une succession infinie de journées.
Qui étaient tes héros ?
Au départ, mes artistes préférés étaient les Cramps, les Ramones. J’adorais la simplicité et la sauvagerie du punk. Puis j’ai découvert le rock’n’roll des années 50 et j’ai réalisé que tout venait de là. Cette musique, c’était déjà du punk. Dans le son, dans l’attitude. Sasha m’a fait découvrir les disques des Andrews Sisters.
Quelle serait pour toi la chanson parfaite ?
Je dirais I Only Have Eyes for You des Flamingos. Tout y est parfait: la mélodie, les textes, et la façon dont ils cohabitent.
Ta musique a beau puiser dans le rock and roll fifties, elle reste contemporaine. Comment la décrirais-tu ?
Je ne fais pas de la musique rétro, contrairement à ce qu’on dit souvent. En revanche, j’aime jouer avec les vieux éléments. Je tire une grande satisfaction à faire fondre les idées d’hier pour mieux les sculpter, les modeler à nouveau.
Quels sont tes projets pour 2013 ?
J’ai une longue série de concerts devant moi. Je vais probablement passer mon année dans les hôtels. J’aime cette perspective et ça m’inquiète un peu. J’ai l’impression d’être toujours dans la fuite, je refuse la réalité. Passer sa vie dans les hôtels avec une valise, je ne suis pas sûr que ce soit très sain. Mais j’ai toujours voulu être un vagabond, un gitan.
Album Here’s Willy Moon (Barclay/Universal)
Concert le 24/4 à Paris, Flèche d’Or
www.willymoon.com
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