A la suite du meurtre d’un confrère, un flic de L.A pourchasse un chef de réseau de faux monnayeurs. Willem Defoe énorme en héros vénéneux et ambigu, dans ce film de 1985 qui ressort en salles.
Avant l’avènement de Michael Mann, Police fédérale Los Angeles, réalisé en 1985, et qui ressort en salles, a longtemps été l’étalon-or du polar angeleño. L’intrigue en est assez classique : suite à la mort de son partenaire abattu lors d’une filature solo, un jeune flic tête brûlée poursuit obsessionnellement un chef de réseau de faux monnayeurs.
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La patte de Friedkin consiste d’abord à brouiller les lignes entre le bien et le mal : le flic n’hésite pas à utiliser des moyens illégaux et à court-circuiter sa hiérarchie pour parvenir à ses fins, agissant autant par vengeance personnelle que pour l’intérêt général. De l’autre côté, le truand est un individu calme, sophistiqué, amateur d’art. Policier casse-cou (il pratique le saut à l’élastique) contre gangster yuppie (c’est le beau et inquiétant Willem Dafoe dans un de ses premiers grands rôles), on est dans un affrontement sans merci qui laisse peu de place aux sentiments, dans un univers viril où les femmes sont réduites aux rôles d’auxiliaires des hommes et d’objets sexuels.
To live and die in LA
La vraie force du film, c’est bien sûr le style Friedkin qui filme à la fois le LA bohème chic dans le style lisse hight tech des années 80 (loft d’artistes, bars sombres, lumières bleutées, néons colorés, sexe, le tout scandé par le rock et la pop FM de l’époque) et le LA industriel, vaste paysage d’usines, de cheminées, de hangars, de câbles électriques et de terrains vagues, un assemblage béton, métal, garrigue et poussière brûlé par le soleil. Cette plongée dans l’envers du décor de la cité des rêves culmine avec une homérique poursuite de bagnoles à travers des entrepôts, le lit asséché de la LA river puis un freeway pris à contresens, réplique californienne du fameux morceau de bravoure new-yorkais de French connection.
Dans son entreprise de stylisation, Friedkin est bien épaulé par Robby Müller, le chef-opérateur de Wenders sur Paris Texas, aussi à l’aise pour sublimer un bar de gogo danseuses qu’un crépuscule sur une ligne de pylônes ou sur les docks de Long Beach. Mais la lumière californienne est ici un leurre : Police fédérale… est un film sombre, hanté par le cynisme, l’individualisme et la mort, comme l’indique son titre original, To live and die in LA.
Police fédérale, Los Angeles, de William Friedkin, en salle en version restaurée
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