L’institution créée en 1635 renouvèle ses membres, le siège de Jean-Loup Dabadie étant libre depuis son décès en 2020. Qui sera le prochain élu ce 9 mars ?
Même Frédéric Beigbeder s’est présenté. De là à penser qu’il a arrêté la coke pour pouvoir porter l’habit vert, il n’y aurait qu’un pas. À moins que ce ne soit l’attrait de l’épée ? L’argent, sans doute pas, les académicien·nes ne gagnant pas beaucoup plus de 3 000 euros par an – sauf si, sait-on jamais, leurs a-valoir dans l’édition se voient soudain gonflés comme par magie, comme c’est dit-on le cas des juré·es de certains grands prix.
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Hélas pour Beigbeder, il n’est pas le seul à vouloir finir immortel : parmi les plus connus, Benoît Duteurtre, Franz-Olivier Giesbert et Éric Neuhoff se sont également portés candidats au fauteuil de Jean-Loup Dabadie, décédé en mai 2020. C’est fou comme à un certain âge, la rédaction d’un dictionnaire – la mission principale des académicien·nes – suscite l’enthousiasme des auteurs de droite. Aujourd’hui jeudi 9 mars, l’immense suspense qui accompagne cette élection prendra fin. On murmure que Neuhoff aurait ses chances, un signe de fermeture à double tour.
Fondée en 1635 par Richelieu pour fixer les règles de la langue française, et la protéger, l’Académie n’a certes jamais brillé par son ouverture d’esprit, voyant l’ennemi en tout changement. Si le plus grand des ennemis du français fut longtemps l’anglais, il semblerait que la menace d’une féminisation des mots – donc des mentalités, de la société, etc. – ait pris le relais. En 1984 et 1986, quand le Premier ministre suggéra de permettre la féminisation des noms de métier, il se heurta à un refus de l’Académie. Rebelote en 1997. Il aura fallu attendre 2019 pour que cette requête soit entendue. Mais doit-on s’étonner ? Après tout, qu’attend-on d’une institution où la première femme – Marguerite Yourcenar – fut nommée en 1980 ? En quatre siècles, seulement dix femmes ont été acceptées dans ce cénacle (trop) masculin. Quand Chantal Thomas a été nommée en 2021, elle a décidé d’imposer la féminisation aux symboles mêmes de l’Académie, en choisissant de recevoir un éventail – rouge et or – plutôt qu’une épée. On craint que ce ne soit pas suffisant.
Édito initialement paru dans la newsletter Livres du 9 mars. Pour vous abonner gratuitement aux newsletters des Inrocks, c’est ici !
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